Le printemps des poètes : le courage
FAIT DIVERS
Un enfant suspendu au-dessus du grand vide
s’accrochait au balcon d’un immeuble élevé.
Les passants sidérés et de crainte figés
se sentaient impuissants et regardaient, livides.
Un homme avait bondi, surgi on ne sait d’où.
Il était jeune, souple, il comptait sur la chance
et, grimpant à main nue sur la façade immense
il parvint au petit, le dégageant tout doux.
Les badauds, soulagés, ne sachant plus quoi dire
admiraient le courage du héros inconnu
inconscient du danger, à ce point ingénu ?
Comment le remercier ? Alors ils applaudirent.
Ce geste courageux l’a-t-on récompensé ?
L’homme était un migrant marqué par le malheur.
Comment lui refuser un peu de ce bonheur
auquel il aspirait ? Qu’en fut-il ? Je ne sais.
Jeanne FOUCHER Mars 2020

Oser être soi
Le courage n’est pas que bravoure ou exploit
Il est, au quotidien, la maîtrise de soi
Quand il faut affronter, ou autre, ou différent,
Le geste de pitié ou l’œil indifférent ;
Quand il faut relever la tête et le combat
Dans la chute ou l’échec pour repartir plus droit.
Quand il faut continuer ou plus jeune, ou plus vieux,
Un chemin conjugal fait pour se vivre à deux.
Le courage est aussi dans le juste à trouver
Entre la complaisance et la facilité ;
C’est refuser de braire à l’unisson des autres
Pour être au goût du jour ou des faux bons apôtres.
C’est au prix de l’effort, de savoir dire non
Lorsque c’est nécessaire et que l’on a raison.
Le courage c’est ça et c’est vous et c’est moi
Se voir tel que l’on est, et oser être soi.
Irène Gaultier-Leblond 15 février 2020

Courage mon gars !
Une foule immense, à perte de vue
Se presse, s’agite tout près de l’estrade.
Le gars s’y retrouve dessus comme à la parade.
Surpris de dominer cette vague humaine
Qui ne cesse de manifester sa joie, sa peine.
Un ami parla avec aisance et audace.
La foule joyeuse s’esclaffe de ses bons mots.
Venu son tour, il voulu refuser le micro.
Tu es jeune ! Lance-toi ! Fais face !
Vas-y mon gars, criaient les uns comme au guignol.
On pouffait de rire, on vit son manque d’assurance.
Alors il se dresse. Sa cause est juste, urgente.
Le climat réclame des actes, pas de vaines paroles !
Corps tendu, il Hurla des mots qu’il détacha
Jetant de toute son âme une vigueur anxieuse !
Une clameur jaillit dans une communion fiévreuse !
Moment incroyable. On le félicita.



"Arnaud Beltrame, né le 18 avril 1973 à Étampes et mort le 24 mars 2018 à Carcassonne, est un officier supérieur de gendarmerie français, connu pour s’être volontairement substitué à un otage au cours de l’attaque terroriste du 23 mars 2018 à Trèbes et avoir succombé aux blessures reçues durant cet événement. L'otage était une femme prénommée Julie."
ARNAUD BELTRAME
… assassiné le 24 mars 2018
Un chant qui retentit et un vers qui résonne
En lui… Qu’un sang impur abreuve nos sillons…
Des cris, des coups de feu, puis d’horribles visions
Et la mort qui s’accroche aux tours de Carcassonne.
« Honneur » et « Liberté », ces mots qu’on emprisonne
Dans un carcan rouillé de vaines illusions.
L’humanité toujours découpée en haillons
Et mise au pilori par le diable en personne.
Ciel bleu d’Occitanie où plonge son regard :
« Seigneur, soutenez-moi, je plaide non-coupable. »
L’amour devient alors son unique étendard
Et parce qu’il se sent calme et inébranlable,
Il concède à Julie sa vie et son bonheur,
Simplement, humblement, comme on offre une fleur.
BIEN SÛR …
Bien sûr qu’il en faut du courage
Pour supporter cette vie-là !
Quand assis dans la rue, tu dois tendre la main
Pour une pièce en cuivre ou un quignon de pain.
Il pleut, tu as froid, il grêle, il neige : qu’importe
Pour logis, pour abri tu squattes un pas de porte.
Au banc de la société regard implorant
Tu me vois passer l’air indifférent, pourtant
Te voir ainsi exclu cela me fait bien mal.
L’homme avili, méprisé ce n’est pas normal.
Bien sûr qu’il en faut du courage
Pour supporter cette vie-là !


VICTOIRE
Tous ensemble dans le bateau,
Chacun sa peine et sa ration.
Je t'aime, je te combats frérot,
Il nous faut le courage du lion.
Parfois la force flanche,
Mais nous résistons.
Parfois l'espoir penche.
Mais nous nous aimons.
Vous les valeureux aimants,
Vous les doux combattants,
Continuez à y croire,
Exister est notre victoire.
Le trésor du sage
- « Bonjour monsieur le Courage !
Je viens vous solliciter.
La vie est un héritage
S'avérant bien compliqué. »
- « Je veux bien ! répond Courage
De la force t'apporter.
Mais garde-toi de la rage
Qui ne fait rien avancer.
Je sais trop bien qu'à ton âge
Comme il est dur de gérer
Cette impression de naufrage
Où l'on n'est plus écouté.
Oublierais-tu l'avantage
D'avoir le temps d'admirer
Avec le regard du Sage
Un monde si mal aimé ?
Une richesse, un visage
Dont nous sommes tant sevrés.
Voudrais-tu de mon courage
Pour ce trésor aller chercher ? »
Julie – mars 2020


DES EXTRA ORDINAIRES EXTRAORDINAIRES
Une étoile capricieuse, au détour d’un chemin,
A choisi de te suivre, en restant près de toi…
Fantasque et intrépide, elle t’a pris par la main,
Te voici différent, loin et proche de moi…
Le hasard, trop stupide, cultive l’ineptie,
Affublant les destins d’un chemin laborieux.
Tu as apprivoisé la fleur d’épilepsie…
La musique t’emporte ; elle embellit tes yeux…
Et toi que je regarde avec admiration,
J’honore ta ferveur et ta noble assurance ;
Tu sembles heureux de vivre, au gré des émotions ;
Chacun doit te chercher derrière les apparences.
Tu connais, à merveille, les secrets de ton corps,
Et je devine, alors, qu’à force de défis,
Tu seras le héros d’une équipe handisport…
Qui pourrait en douter devant ton énergie ?
Mais voici les danseurs et le bonheur s’élève…
L’insigne chorégraphe illumine leur vie.
Je remercie le maître et ses dignes élèves…
Armés de volonté, près de nous, ils sourient.
Des êtres courageux, porteurs de handicap,
Habillent l’existence d’une robe nouvelle…
En tous lieux, ardemment, ils franchissent des caps,
Construisant, chaque jour, une œuvre exceptionnelle …
Bella Pochez, née Bella Weil, d'origine alsacienne est venue s'installer à Fécamp à la suite de son mariage avec Maurice Pochez. D'abord interprète à la mairie pour les Allemands (en 1940 à la Kommandantur), elle est remerciée à cause de ses origines juives deux ans plus tard. Elle fut envoyée à Drancy puis à Auschwitz où elle fut gazée. Bella Pochez a intercepté de nombreuses lettres de dénonciation.

Continuer
Le valeureux soldat, pour son engagement,
Obtiendra des honneurs car il risque sa vie.
Le sportif victorieux grâce à l’entraînement.
Sera ovationné par la foule ravie.
Mais l’ouvrier usé et perclus de lésions
Qui doit, jour après jour respecter la cadence,
Le malade traînant avec sa perfusion,
Comme un boulet de fer, sa peur et sa souffrance,
La veuve inconsolée qui, malgré son chagrin,
Remplit en s’activant, le vide de l’absence,
L’écolière harcelée, rêvant de jours sereins,
Tous avancent dans l’ombre et dans l’indifférence.
C’est leur ténacité qu’il faudrait saluer,
Héros du quotidien, luttant vaille que vaille,
Car leur unique gloire est de continuer.
Mais les guerriers obscurs n’ont jamais de médaille !

LE COURAGE
Quand on a que ...
ses intimes convictions
le courage de ses opinions
sans autre option …
il faut bien avouer que
ça demande du courage,
quel que soit son âge
pour faire vivre ses idées
Démontrer ,prouver, persuader
avec des pages,des pages
de brouillons …
froissées avec rage
et recommencer
pour plus de précisions
Écrire est il bien sage
puisqu'atteindre la perfection
même avec courage
c'est une illusion !
Quand on a que
ses intimes convictions
le courage de ses opinions
sans autre option
il faut bien avouer que
tout son courage
mis à contribution
se ternit avec l'âge
si on n'y fait pas attention
l'émotion, un passage
la perdre n'est pas la solution .
Alors du courage, du courage.
Danydeb (novembre 2019)




Le migrant.
Il a fait face à cent dangers
pour abandonner son Afrique,
en engageant jusqu’aux derniers
les sous de sa vie erratique.
A traverser mers et pays,
quelquefois risquant l’esclavage,
sans aide et nul soutien depuis,
il a fait preuve de courage.
Un jour, en France, ce garçon,
qui ne cherchait qu’asile ou gîte,
a vu l’enfant sur son balcon
tout prêt à tomber dans le vide.
Alors, son cœur n’a fait qu’un tour
pour grimper la façade sale
avec cran et un brin d’amour,
le sauvant de la fin fatale !


Camille Claudel L’implorante
Camille Claudel, sculptrice de génie qui fut la maîtresse et l’égérie de Rodin, est internée depuis trente ans. Elle guette en vain, chaque jour, la venue de son frère Paul de quatre ans son cadet et qu’elle chérit profondément… Ce jour-là, assise à sa fenêtre, elle croit le voir arriver, elle exulte, et s’exalte jusqu’à ce qu’une religieuse s’approche…
Enfin !
« Mon petit Paul, enfin ! Je t’ai tant attendu,
Comme sur la colline, enfants, t’en souviens-tu ?
Tu n’arrivais jamais à rattraper mon pas
Et je courais, cruelle, en riant dans les bois,
Mais tu es là, enfin ! Parle de toi, de tout,
De la maison, de l’atelier surtout,
De ta vie, de ton œuvre, de ce qui m’est perdu,
Parle-moi des amis … Quel nom prononces-tu ?
Monsieur Rodin ? Ah non, ne parlons pas de lui
Le temps m’est trop compté, ce qu’il faut aujourd’hui
C’est m’apporter ma blouse, mon ciseau, mon burin,
Ce qui est nécessaire, enfin, plus que le pain ;
Me donner mes outils, je n’ai que peu de temps,
Regarde mes cheveux, ils sont déjà tout blancs…
Vite, mes mains ont faim de glaise à triturer,
Vite, il reste, je sens, des formes à créer… »
… – Camille, calmez-vous, revenez vous coucher
Monsieur Claudel viendra dès demain vous chercher.
LA MÉMOIRE ET LE CIEL
Entre les mâts des plaisanciers
Se profile un vaisseau fantôme ;
Il paraît qu'au siècle dernier
La banquise était son royaume...
Mais un jour il a fait son nid
Au pied de l'ancienne mâture,
Et dans le bassin Bérigny
Il raconte ses aventures
Aux jeunes Fécampois surpris.
Il désigne dans les nuages,
Les spectres blancs, les spectres gris
Qui composaient son équipage :
Deux matelots vaguement saouls
Traînent un sac dans les coursives ;
L'armateur parle de gros sous
Au capitaine qui s'active.
Une maman berce un landau
Où s'égosille une fillette ;
Un gamin pleure et dans son dos,
Un vieillard se signe en cachette.
Jeunes garçons si vous voyez
En vous promenant le dimanche,
L'armada des jolis voiliers
Et leur valse des voiles blanches,
N'oubliez pas le Minerva,
Le Shamrock, La Jeune Française,
Et le cafard qui vient, qui va
Comme la vague à la falaise.

Écoutez bien le vieux gréement...
C'est peut-être votre grand-père
Qui mêle sa parole au vent
Pour vous apprendre la prière
Qu'il récitait en s'embarquant
Pour quatre ou cinq mois de misère.
C'est le chant sacré de Fécamp,
Son catéchisme, son bréviaire.
Jeunes gens, à vous de porter
Le témoignage et la mémoire
De ceux qui firent la fierté
De Fécamp et de son histoire.
© Daniel Cuvilliez(inédit-12/02/2020)
N'oubliez pas tous ces marins
Prisonniers des nuits de Norvège,
Du froid glacial qui les étreint
Sur les chalutiers pris au piège.

BIEN SÛR …
Bien sûr qu’il en faut du courage
Pour supporter cette vie-là !
Toi le jeune ouvrier qui monte sur le toit
Afin que j’aie moins froid dès les premiers frimas
Tu isoles la cage où je suis encagée
Que je m’y sente au chaud (fenêtres calfeutrées).
T’ai-je dit grand merci ? Je ne m’en souviens plus,
Mais je connais sur toi les jours où il a plu.
Les affres de l’hiver loin du pays natal
Toi le déraciné trouves-tu ça normal ?
Bien sûr qu’il en faut du courage
Pour supporter cette vie-là !
Courageuse pâquerette !
Elle a l’air de rien, pâquerette,
Dans nos pelouses si discrète,
Sans le parfum de la violette.
Comme son nom l’indiquerait
On penserait qu’elle apparaît
Uniquement au mois de mai.
Or voici qu’elle nous surprend
En fleurissant à tout moment
Bravant les caprices du temps.
En vérité rien ne l’abat
Même la faux ne la tue pas
Elle revit, quoi qu’il en soit.
Sa vision est belle leçon
De courage et d’adaptation,
Pâquerette au si joli nom !
Julie mars 2018


Courage
nuit qui hante la tête espoir introuvable aux lendemains qui s'esquivent
dérobade des idées déflorées en communication marchandise des émotions
monde brutal enkysté dans ses chiffres gloutons et ses livres de comptes
mais se lever pourtant
journées avortées avant le soir en solitude irréparable piège de la performance
regards morts en miroir de soi seul selfies des renonciations ignares
musiques d'ambiance hallucinantes hypnose de la volonté déchue
mais continuer pourtant
recherche du prochain vanité qui s'efface derrière son portable-avortement du monde
appels lancinants sans aide et sans secours qu'une voix froidement numérique
sourires fragiles tendus au bord du vide d'où personne ne vous répondra
mais s'accrocher pourtant
espérance ectoplasme des discours configurés par des algorithmes erratiques
humanité convenue à marche forcée repue de désirs indigents taillés dans l'inutile
sentimentalisme gluant bannissement des sentiments sincères esbroufe pour aveugler
mais se dresser pourtant
ne pas lâcher ne pas renoncer repartir remonter dire
pour une nuit d'étoiles sur un jour ouvert
pour des mains qui apaisent et des mots éclatants
poésie du courage courage des poètes
Daniel-Claude Collin / mars 2020