Couleurs

Quelques citations et textes d'auteurs

Tant que la couleur de la peau sera plus importante que celle des yeux, nous ne connaîtrons pas la paix. Hailé Sélassié
Un ton seul n'est qu'une couleur, deux tons c'est un accord, c'est la vie. Henri Matisse
Toutes les eaux sont couleur de noyade. Emil Michel Cioran
J'essaie d'appliquer des couleurs comme des mots qui façonnent des poèmes, comme des notes qui façonnent de la musique.
Joan Miro
La beauté n'est pas dans les couleurs, mais dans leur harmonie. Marcel Proust
Efface le gris de la vie et allume les couleurs que tu possèdes à l'intérieur... Pablo Picasso
J'ai été hier au cinéma. Voir un film en noir et blanc. Pas un film en couleurs : je suis en deuil. Raymond Devos
Si toute vie va inévitablement vers sa fin, nous devons durant la nôtre, la colorier avec nos couleurs d'amour et d'espoir. Marc Chagall
Ma vie c'est moi qui vais la peindre, alors je vais y mettre le feu en ajoutant plein de couleurs. Grand Corps Malade
Il faut qu'une porte soit ouverte... ou d'une autre couleur. Pierre Dac
Il y a deux sortes de mariage le mariage blanc et le mariage multicolore. Ce dernier est appelé ainsi parce que chacun des deux conjoints en voit de toutes les couleurs. Georges Courteline
Les couleurs politiques sont comme les couleurs du peintre, elles n'ont qu'une surface mince et cachent toutes la même toile. Alphonse Karr
Voyelles
A noir, E blanc, I rouge, U vert, O bleu : voyelles,
Je dirai quelque jour vos naissances latentes :
A, noir corset velu des mouches éclatantes
Qui bombinent autour des puanteurs cruelles,
Golfes d’ombre ; E, candeurs des vapeurs et des tentes,
Lances des glaciers fiers, rois blancs, frissons d’ombelles ;
I, pourpres, sang craché, rire des lèvres belles
Dans la colère ou les ivresses pénitentes ;
U, cycles, vibrements divins des mers virides,
Paix des pâtis semés d’animaux, paix des rides
Que l’alchimie imprime aux grands fronts studieux ;
O, suprême Clairon plein des strideurs étranges,
Silences traversés des Mondes et des Anges :
— O l’Oméga, rayon violet de Ses Yeux !
Arthur Rimbaud

La terre est bleue
La terre est bleue comme une orange
Jamais une erreur les mots ne mentent pas
Ils ne vous donnent plus à chanter
Au tour des baisers de s’entendre
Les fous et les amours
Elle sa bouche d’alliance
Tous les secrets tous les sourires
Et quels vêtements d’indulgence
À la croire toute nue.
Les guêpes fleurissent vert
L’aube se passe autour du cou
Un collier de fenêtres
Des ailes couvrent les feuilles
Tu as toutes les joies solaires
Tout le soleil sur la terre
Sur les chemins de ta beauté.
Paul Eluard, L’amour la poésie, 1929


Qui est vraiment l’homme de couleur ?
Homme blanc,
Quand je suis né, j’étais noir
Quand j’ai grandi, j’étais noir
Quand je vais au soleil, je suis noir
Quand je suis malade, je suis noir
Quand j’ai peur, je suis noir
Quand je mourrai, je serai noir
Tandis que toi, homme blanc
Quand tu es né, tu étais rose
Quand tu as grandi, tu étais blanc
Quand tu vas au soleil, tu es rouge
Quand tu as froid, tu es bleu
Quand tu as peur, tu es vert
Quand tu es malade, tu es jaune
Quand tu mourras, tu seras gris
Alors dis-moi, de nous deux, qui est l’homme de couleur ?
Léopold Sédar Senghor

L’Oiseau bleu
J’ai dans mon cœur un oiseau bleu,
Une charmante créature,
Si mignonne que sa ceinture
N’a pas l’épaisseur d’un cheveu
Il lui faut du sang pour pâture.
Bien longtemps, je me fis un jeu
De lui donner sa nourriture :
Les petits oiseaux mangent peu.
Mais, sans en rien laisser paraître,
Dans mon cœur il a fait, le traître,
Un trou large comme la main,
Et son bec, fin comme une lame,
En continuant son chemin,
M’est entré jusqu’au fond de l’âme !…
Alphonse Daudet, Les Amoureuses, 1858
Les papillons
Le papillon, fleur sans tige,
Qui voltige,
Que l’on cueille en un réseau ;
Dans la nature infinie,
Harmonie
Entre la plante et l’oiseau !…
Quand revient l’été superbe,
Je m’en vais au bois tout seul :
Je m’étends dans la grande herbe,
Perdu dans ce vert linceul.
Sur ma tête renversée,
Là, chacun d’eux à son tour,
Passe comme une pensée
De poésie ou d’amour !
Voici le papillon « faune »,
Noir et jaune ;
Voici le « mars » azuré,
Agitant des étincelles
Sur ses ailes
D’un velours riche et moiré.
Voici le « vulcain » rapide,
Qui vole comme un oiseau :
Son aile noire et splendide
Porte un grand ruban ponceau.
Dieux ! le « soufré », dans l’espace,
Comme un éclair a relui…
Mais le joyeux « nacré » passe,
Et je ne vois plus que lui !
Comme un éventail de soie,
Il déploie
Son manteau semé d’argent ;
Et sa robe bigarrée
Est dorée
D’un or verdâtre et changeant.
Voici le « machaon-zèbre »,
De fauve et de noir rayé ;
Le « deuil », en habit funèbre,
Et le « miroir » bleu strié ;
Voici l’ « argus », feuille-morte,
Le « morio », le « grand-bleu »,
Et le « paon-de-jour » qui porte
Sur chaque aile un oeil de feu !

Mais le soir brunit nos plaines ;
Les « phalènes »
Prennent leur essor bruyant,
Et les « sphinx » aux couleurs sombres,
Dans les ombres
Voltigent en tournoyant.
C’est le « grand-paon » à l’oeil rose
Dessiné sur un fond gris,
Qui ne vole qu’à nuit close,
Comme les chauves-souris ;
Le « bombice » du troène,
Rayé de jaune et de vent,
Et le « papillon du chêne »
Qui ne meurt pas en hiver !…
Gérard de Nerval Odelettes
Deux petits éléphants blancs
C'était deux petits éléphants,
Deux petits éléphants tout blancs.
Lorsqu'ils mangeaient de la tomate,
Ils devenaient tout écarlates.
Dégustaient-ils un peu d'oseille
On les retrouvait vert bouteille.
Suçaient-ils une mirabelle,
Ils passaient au jaune de miel.
On leur donnait alors du lait,
Ils redevenaient d'un blanc tout frais.
Mais on les gava, près d'Angkor,
Pour le mariage d'un raja,
D'un grand sachet de poudre d'or,
Et ils brillèrent, ce jour-là,
D'un tel éclat que plus jamais,
Même en buvant des seaux de lait,
Ils ne redevinrent tout blancs,
Ces jolis petits éléphants.
Maurice Carême

Nos poèmes
JEUX DE COULEURS
Vive les couleurs et leurs variantes
qui rendent l'existence plus riante.
L'uniformité engendre l'ennui ;
la couleur à la gaieté nous induit.
Imagine-t-on, sans fanions, la fête ?
le jardin sans fleurs, sans ses pâquerettes ?
Que dire de la sinistre burqa
qui, du corps féminin, sonne le glas !
Les couleurs d'amusent, se marient :
Bleu et jaune verdissent s'ils se lient,
mais s'il voit rouge, bleu devient violet.
Lorsqu'il s'éclaircit, et ce n'est point laid,
s'alliant à la rose, il est mauve tendre.
Le noir à la couleur peut-il prétendre ?
Le peintre Pierre SOULAGES le dit.
Alors devons-nous lui faire crédit ?
Noir c'est noir nous affirmait HALLYDAY.
À chacun de trouver sa vérité.
Jeanne FOUCHER Septembre 2023

ROUGE OU NOIR ?
Noire est la nue chargée d'orage
et la nuit porteuse de peur.
Noire est la colère peu sage
qui n'engendre que du malheur.
Rouge est le sang, fleuve de vie.
Rouge est symbole de l'amour
comme la fleur que l'on convie
à dire : "A toi et pour toujours".
Comme la lèvre purpurine
qui scelle les serments d'un soir
j'aime le rouge, alors devine
pourquoi je n'aime pas le noir.

COULEURS
Elle chante. Elle nous enchante
l'ample symphonie des couleurs.
Sans elles que seraient les fleurs ?
Sans doute assez peu attirantes…
Le plaisir prendrait la tangente
dans un cadre mouillé de pleurs
évoquant plutôt le malheur
en une vie peu alléchante.
Dame Nature, heureusement,
y a pourvu abondamment
par sa palette généreuse.
De délicieuses nuances
sont une véritable chance
éveillant notre enchantement.
Jeanne FOUCHER Septembre 2023



COULEURS DE LA VIE
Pourquoi appelle-t-on nuits blanches
celles qui sont noires ?
Et pourquoi la colère fait-elle voir rouge ?
Si je suis verte de peur,
pourquoi cette dernière est-elle bleue ?
Notre existence se reflète-t-elle donc
dans cet étrange arc-en-ciel ?
La couleur des âmes ou La règle du « Je »
A l’encre de nos vies, écrivons noir sur blanc,
Nos secrets envolés sur les ailes du vent !
Au gré de mon pinceau, en rêvant, je m’évade,
Les nuances, aussitôt, me jouent la sérénade…
Mais la teinte des mots, lorsque glisse ma plume,
Dira la joie, les maux, le bonheur, l’amertume…
Celui-ci a vu rouge, celui-là, que du bleu…
Tous les coloris bougent ; c’est la règle du «Je » !
Quand des propos pervers habitent la rumeur :
L’âme grise persévère, enfantant ses clameurs …
Attention à la « Blanche »* car des éléphants roses
Hanteront vos dimanches, et valseront les choses !
Mon rire devient jaune, quand surgit la souris,
Mais plus vif qu’un cyclone, mon matou gris sourit !
Souriez, mauves et blancs, dignes rois de l’hiver !
« Chanson pour les enfants », merci, Monsieur Prévert !
Vous qui êtes fleur bleue, sous l’œil du désespoir,
Reculez-vous un peu, si votre ciel est noir …
Allez--vous mettre au vert, enivrez-vous des fleurs !
Respirez le grand air, réjouissez votre cœur !
Le rouge en lavallière, signant son entité,
Ne troublez pas grand-père, il lit « l’Humanité ».
Qu’il soit blanc, jaune, ou noir, l’Homme de tous les temps,
A façonné l’Histoire, sur l’empreinte des ans.
Tantôt un Paradis ou tantôt un Enfer,
Les accents de la vie, c’est l’ombre ou la lumière…
Et si à pile ou face, vous jouez votre destin,
Les couleurs ont leurs places, aujourd’hui et demain…
*La blanche : drogue


COULEURS EN FETE
Quand l’ombre et la lumière s’unissent dans tes cieux
Ô! Village, tu es cher, à mon cœur, à mes yeux…
Quelques pépites d’or, et les reflets d’argent
Des roses de l’aurore, brillent au firmament.
Hélios, en promenade s’avance pas à pas, Jouant la sérénade, il veut séduire Gaïa.
La campagne enneigée comme un jeu de miroirs,
La forêt et les prés, scintillent jusqu’au soir.
Le soleil qui enflamme l’horizon dégagé,
Déclinera la gamme des rouges orangés…
Lorsque la nuit s’avance, nébuleuses sublimes,
J’admire vos nuances ; vous inspirez mes rimes…
En camaïeu de gris, aux couleurs de l’ardoise,
La nature assombrie se fait ombre chinoise…
Un beau halo de lune éclaire, doucement,
L’écran de la nuit brune qui, peu à peu, s’étend…
Alors, tournons la page; les muses vont dormir…
A demain, mon village, je t’aime et je t’admire!
Notre drapeau
"La levée des couleurs".
Eh oui ! c'était ainsi
Que l'on rendait honneur
A sa patrie chérie.
On levait le drapeau
Avec un grand respect,
Trois couleurs tout là-haut
Qui nous représentaient.
Pas n'importe lesquelles :
Le bleu, le blanc, le rouge,
Les traces immortelles
De la France qui bouge.
D'autres pays arborent
Ces mêmes trois couleurs,
Mais sans tous les accords
Des élues de nos cœurs.
Ô toi notre drapeau
Vénéré de nos pères !
Des couleurs, ton trio
Reste notre repère.
--------
Julie - septembre 2023



Pourquoi ?
ou
"la palette des couleurs"...
La vie en ce temps
Est en noir et blanc.
C'est oui ou c'est non
A toute question.
Etre pour ou contre ?
Pas d'hésitation.
Nous devons répondre
Par oui ou par non...
oOo
"Et moi ! Pauvre de moi !"
Qui tant aime les couleurs,
L'arc-en-ciel des choix,
La palette des humeurs.
oOo
J'aime les discussions,
Les échanges de vues.
Même sans solutions
Les idées évoluent.
Chaque matin, la vie
Vient me donner raison,
Quand je vois l'infini
De ses propositions.
Sa palette de couleurs,
Son nuancier offert,
Elargissent mon cœur
A l'aune de l'Univers...
oOo
Pourquoi ! pauvre de moi !
De toutes ces valeurs,
Je devrais faire le choix
D'une seule couleur ?
Pourquoi ?...
Julie - septembre 2023

COULEURS D'ETE
Couleurs d'été, couleurs de juin
L'été prend la couleur des foins.
Sur la côte, la moindre houle
Semble un dragon qui se déroule
Et étale sa robe d'or
La froisse et la défroisse encor.
L'hypnotisante mélodie
Des ors, répand sa panoplie.
Le vert opale de la mer
Remue ses algues dans l'aber,
Se pare de flèches brillantes
Capture l'étoile filante.
L'ombre vibrante de chaleur
Explose ses sautes d'humeur
Tel un ping-pong qui rebondit
Fusion d'un or qui refroidit.
C'est l'or du ciel qui se distille
Et qui de tous ses feux scintille.
L'échoppe du "grand bijoutier"
Ruisselle des ors de l'été.
Danièle MANOURY CAEN, le 17 juin 2023


AVEC LE CŒUR
Avec le cœur on voit des choses,
Bleues, mauves ou roses,
Avec le cœur on voit des choses !
La fleur née, la fleur éclose,
La branche où l'oiseau se pose,
Blanche, bleue ou rose,
Un matin que la pluie arrose,
Un œuf dont la coque explose,
La splendeur d'une passerose,
Un poussin né, petite chose
Près de la poule se repose.
Avec le cœur on voit des choses,
Bleues, mauves ou roses
Alors plus de persiennes closes,
Adieu malheur, adieu névroses,
Que votre cœur soit plein de roses
Pour qu'en ciel bleu il se repose !
Danièle MANOURY TOURVILLE SUR ODON 1978

Couleurs d’orage d’été.
Le ciel se couvre lentement
de noir, en habillant la ville
d’un linceul déjà menaçant
mû par un souffle encor tranquille.
Un éclair fend la chape au loin
à l’éclat blanc sentant l’orage,
suivi du tonnerre en chemin
avec un roulement sauvage.
Puis, pendant que le firmament,
dans son ensemble, s’illumine,
les vannes célestes s’ouvrant,
c’est le déluge qui domine.
La douche ne durant qu’un temps,
juste pour éveiller la flore,
les cieux retrouvent, grâce aux vents,
leur arc-en-ciel multicolore !
Michel BARTHA May-sur-Orne, le 12 septembre 2023.


Couleurs
Jeu infini des fréquences
des infrarouges aux ultraviolets
l'univers est un arlequin facétieux
qui se moque de nous
en nous cachant l'infinité des longueurs d'ondes
Aveugles à ces moirures inaccessibles
frappés aussi de surdité
nous devons inventer des prothèses multiples
pour colorer notre esprit
un peu
de ces richesses qui nous échappent et nous narguent
en notre impuissance native
Mais notre arc - en - ciel s'élargit à petits pas
n'en déplaise aux imbéciles braillards
et aux complotistes
qui ne voient pas plus loin
que le bout de leurs pouces frénétiques
aux écrans riquiqui
Les spasmes de la bêtise sont aussi insondables
Daniel-Claude Collin / septembre 2023
Couleurs
Donne, vert secourable,
courage et espérance
au lecteur en partance
pour ce poème aimable !
Et toi, mon ardent jaune,
lumineux et joyeux,
l'allégresse du faune
à son désir frileux !
Quant à toi ô mon rouge,
dynamisme et ardeur
pour que son âme bouge
et que vibre son cœur !
Mais, j'attends de toi, noir
voluptueux et secret,
une fraîcheur de soir
sur son front enfiévré.
Et de toi ô mon blanc,
en ton vaste silence,
l'ultime transcendance
sur son esprit planant.
Enfin de toi ô mon bleu,
calme et sérénité.
Repose ses deux yeux
par ton humble clarté !


Bleue, elle entre
Bleuir ton âme
Laver tes encres d’obsidienne
Ecarter tes ombres
Unifier ton regard
Enterrer toutes tes peurs
Eclairer tes opacités
Libérer ta lumière
Lier la nuit à l’éblouissement du jour
Entrouvrir le rideau
Ecrire l’indigo de nos corps
Noyer l’intime et le solaire
Tenir les cauchemars en laisse
Rester là, à l’entrée de nos jours
Etre à ta frontière, en équilibre.
Le cœur en gris
Tout est gris.
Le ciel est gris,
Les murs et les toits sont gris.
Quelques volets déjà sont mis ;
Aucune présence, aucun bruit,
pas même une herbe qui frémit
sur le trottoir asphalté gris
D’où viendra un signe de vie ?
Un chat, un chien, un parapluie ?
C'est un corbeau qui s’est lancé.
du coin de la rue dépassé
Jusqu’à la haute cheminée
Qu’il contourne pour se cacher.
Je le guette d’un cœur pressé.
Va-t-il de nouveau se montrer ?
Allez savoir pourquoi, pour qui,
Il m’a emportée avec lui
Depuis le ciel enfin essuie
Sa longue suie,
Fini le gris,
Place à la nuit,
La lune luit.
Irène Gaultier-Leblond 27 juillet 2023



DE TOUTES LES COULEURS
Bleu m’évoque un ciel de beau temps
Qui le contemple est très content.
Cette formule est si banale
Le poème commence mal !
Blanc tu n’es pas une couleur
Les peintres te nomment « valeur »
Loin de moi, passe ton chemin
Vrai cauchemar de l’écrivain !
Rouge a semé la fureur
Qui ébranle ma bonne humeur
Dans ce désordre mes idées
Se perdent tout enchevêtrées.
Jaune buisson de mon jardin
Le soleil de tes fleurs foisonne
Tout ce qu’en bouquets tu me donnes
Vient enchanter mes clairs matins.
Vert printanier reste encore là
Tandis que s’avance l’automne.
Le sapin tressé en couronne
Vert à la Noël restera.
Roses idées je vous préfère
Aux jours gris et aux jours amers
J’aime la vie tout en couleurs
De poésie et de douceur.
Si tu ne sais plus que choisir
Dans la palette des couleurs
Garde les plus chères à ton cœur
L’écossais t’irait à ravir !
cg
Le ciel dans tous ses états
chaque matin au réveil
une question sur les lèvres
comment sera le ciel ce matin
j’aime en effet le ciel dans tous ses états
le ciel en mouvement le ciel immobile le ciel bas
le ciel des profondeurs insondables
celui du jour celui du soir
le ciel des souvenirs le ciel de mon enfance
le ciel à tous les âges de ma vie
quand le ciel ressemble à la mer un ciel de peintre
et que j’aperçois comme si c’était la première fois
les nuages aux couleurs pastel qui se faufilent
comme des poissons argentés au milieu des filets bleus
je ressens au plus profond de moi
le bonheur indicible de vivre
rien de religieux dans ce sentiment
mais une plénitude intérieure
le ciel comme une immense métaphore de la vie
et dans ce ciel en mouvement
un écho se fait entendre
le souffle des vagues sur les rochers
les arbres qui s’agitent pareils à des bateaux
amarrés à la jetée
leurs troncs ressemblent à des mats échevelés.
il arrive parfois qu’à la tombée du soir les nuages
de gris deviennent peu à peu rouges roses ou violets comme si un fleuve de sang se déversait soudain
dans le ciel tout entier
ma mère disait autrefois c’est un signe de guerre
je perçois alors comme un chant murmuré à mon oreille
celui de la douleur du monde
le chant de l’épouvante humaine
avec le temps l’ombre gagne à nouveau sur la lumière
et les nuages sont engloutis comme le reste
dans la pénombre
je devrai attendre le matin pour le recommencement

Montagne ou mer l’hiver
L’hiver je donnerais toutes les montagnes pour la mer
L’angoisse du blanc du ciel gris plombé
Les murs de pierre qui vous écrasent comme une forteresse
L’hiver je me sens décalé étranger au milieu de ces hommes ou femmes semblables à des cosmonautes
Ils marchent bizarrement sur les trottoirs
On dirait qu’on leur a coupé un muscle du jarret
Dans cet univers ce sont les détails qui me sauvent
Un coin de ciel dégagé de ciel bleu le ciel bleu
de Verlaine au-dessus du toit de sa prison
Un petit rayon de soleil qui perce une fenêtre
Ou la visite de l’expo permanente de Van Gogh
dont le jaune et le bleu triomphent
Oubli du temps je revois comme en rêve
la mer au-delà du champ de blé avec son horizon perdu son haleine fraternelle

Retour du Québec
Québec, ce sont des voix, des odeurs, des images. A la poursuite de l’été indien, quatre amis. Cela commence mal. Montréal en plein été. Sa chaleur, ses tours inondées de soleil. Puis changement de temps. Alternance de grisaille et de ciel bleu, mais un ciel variant du bleu pâle presque blanc au bleu profond. Je comprends pourquoi le symbole du Québec est bleu et blanc. L’automne s’installe. Baisse de température. Le miracle. Après la verdure estivale, les couleurs des arbres parfois rouge, mais souvent jaune, orange, avec des milliers de nuances. Mes amis courent après les reflets sur les lacs pour prendre des photos, ils reviennent souvent bredouilles. On aperçoit des bouleaux aux troncs blancs lisses élancés vers le ciel comme des silhouettes de femmes et qui se réfléchissent dans l’eau. Lorsque l’écorce manque sur les arbres, un orignal est passé.
Québec, un finistère, un pays du bout du monde longtemps oublié. Ouvert sur l’infini avec son fleuve St Laurent de quarante à soixante kilomètres de large dans l’estuaire, qui ressemble à la mer. Nous ne verrons que le fleuve à marée basse hélas. Des algues, des rochers, des odeurs marines. Les villages avec leurs maisons blanches paraissent sortis du décor du film Autant en emporte le vent ; avec les maisons multicolores, on se croirait en Irlande. Et puis moment de grâce, avec ce vol d’oies sauvages en formation au milieu d’un ciel gonflé de nuages semblables à une peinture impressionniste. Dans ce pays parfois facétieux, les couchers de soleil ne se donnent pas facilement.
Québec enfin, avec ces femmes et ces hommes aux yeux bleus ou gris, mais doux. Un pays de confiance où la peur ne règne pas dans les regards. Il suffit de croiser les yeux d’un Québécois, homme ou femme indifféremment pour qu’immédiatement il échange avec vous, et cela en toute quiétude. Tous pratiquent avec bonheur l’art de la conversation, avec cet accent si particulier, si agréable à nos oreilles de Français au parler plat. Cet accent semble tout droit sorti du dix-sept siècle, on dirait du Molière littéral. Alors des expressions, des mots inconnus surgissent, avec parfois aussi des malentendus. Ainsi ne dites jamais à un Québécois qu’il est « un habitant » ! Il vous regarderait de ses yeux ronds et rirait.


Les couleurs
Vert printemps
Rouge coquelicot
Jaune primevère
Bleu lavande
et un soupçon de blanc pâquerette
et me voilà habillée
pour la journée
— Tiens te voilà perroquet
me dit ma mère
— Pas le moins du monde
Rouge pour la planète mars
Jaune soleil
Bleu mer
Vert les petits hommes verts
et le blanc lunaire
— Oui c'est bien ce que je disais
te voilà bien colorée
Bientôt on enterra maman
aucun problème pour m'habiller
Le choix fut bien aisé
Merci les conventions
On ne se pose pas de question
Ce jour-là je revis
toute la fratrie
" Finalement le noir te va bien"
me disent les frangins
Et mes sœurs de rétorquer
"Maman aurait bien apprécié
qu'elle soit colorée
Depuis j'ai repris
mon bleu outremer
mon jaune outreterre
mon vert plus que vert
pour faire honneur à ma mère
seule à seule avec elle
Marie-Paule Demon
Rose
comme le petit cochon rose
Bleu
comme le bleu rassurant de tes yeux
Vert
comme le beau sapin vert
et voilà de quoi
colorer
une vie arc-en-ciel
Marie-Paule Demon



Mes pensées bleues
gambadent dans les nuages
et s'envolent en images
dans un océan méthylène
elles divaguent à perdre haleine
dans le turquoise de ses vagues trop peu sages
mes pensées roses
pour chahuter le morose
pour une vie enivrée de pétales
poudrée de senteurs
et d'amour fatal
toute en eau de rose
mes pensées vertes
de maraudes en espérances
d'espérances en fulgurances
partager l'instant découverte
et dans la forêt toujours verte
plonger dans l'émeraude de ma vie
bleu rose et vert
s'entrelacent
pour snober les idées noires
sans fard ni cafard
sans hésiter et toute fière
je veux inscrire leur histoire.
Marie-Paule Demon
Cinquante nuances de gris
Le ciel est au plus bas et mon humeur au gris.
Les brouillards argentés, les nuages grisâtres
Qui endeuillent l'azur de sombres coloris
Donnent à cet été un goût des plus saumâtres.
Insensible à la pluie, indifférente au froid
Une éolienne au loin cisaille la grisaille.
À la place aujourd'hui des moulins d'autrefois
La plaine est envahie de géants de ferraille.
Un éclair fulgurant zèbre le ciel mouvant
Qui soudain s'obscurcit et vire à l'anthracite.
Le silence est troublé par la clameur du vent
Surpris, un passant court s'abriter au plus vite.
Sitôt que se produit l'orchestre assourdissant
De larges gouttes d'eau claquent sur le bitume.
La lueur des éclairs rend le monde angoissant,
Les ruelles mouillées sont couleur d'amertume.
La pluie cingle les toits, déluge torrentiel,
Et saccage les fleurs en pure malveillance.
Mais dans le ciel obscur, un timide arc-en-ciel
Déchirant la noirceur apporte l'espérance.


Dégoût et des couleurs
Je dois bien l'avouer, je n'ai pas la main verte
Avec les végétaux, je suis loin d'être experte.
Je travaille pourtant dans un vieil entrepôt
Où j'entretiens sans joie des orchidées en pot.
Je porte du terreau et mon dos s'ankylose.
Pas de quoi se réjouir et voir la vie en rose !
Si parfois je me plains et si je broie du noir
Je ne me laisse pas aller au désespoir.
Un collègue stupide issu de la banlieue
Par une sombre nuit me fit une peur bleue.
Sortant de nulle part, il surgit derrière moi.
Grimé en mort-vivant, il causa mon effroi.
Je poussai un grand cri et blanche comme un linge
Pour comprendre, je dus me creuser les méninges.
Riant jaune devant mon bourreau rigolard
Je maudissais l'auteur du douteux canular.
Comme je voyais rouge, et réclamais justice
Je rêvais d'un procès dont je serais l'actrice.
Je prendrai pour gagner un avocat marron
Qui saura sans pitié l'envoyer en prison.
Je tiendrai ma vengeance, et souriant aux anges
Il se peut qu'un beau jour j'apporte des oranges.