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La peur

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Quelques citations

Exposez-vous à vos peurs les plus profondes ; après cela, la peur ne pourra plus vous atteindre.     Jim Morrison

Que vos choix soient le reflet de vos espoirs et non de vos peurs.

Nelson Mandela

La crainte de perdre ce que l'on a nous empêche d'atteindre ce que l'on est.

Saint-Augustin

Le trac est l'humilité des gens de vrai talent.

Pierre Desproges

Le trac, cela vient avec le talent.

Sarah Bernhardt

C'est des hommes et d'eux seulement qu'il faut avoir peur, toujours.

Louis-Ferdinand Céline    Voyage au bout de la nuit

Le doute et la peur sont les auxiliaires des grandes initiatives.

          Amélie Nothomb

Celui qui contrôle la peur des gens devient le maître de leurs âmes.

Nicolas Machiavel

Rien ne rapproche les êtres comme d'avoir peur ensemble.

Marguerite Yourcenar

Personne ne doit avoir peur de l'inconnu, parce que tout homme est capable de conquérir ce qu'il veut et qui lui est nécessaire.

Paulo Coelho   L'Alchimiste,

Une fois pris dans l'événement, les hommes ne s'en effraient plus. Seul l'inconnu épouvante les hommes.

Antoine de Saint-Exupéry

Textes d'auteurs

Terreur

Ce soir-là j’avais lu fort longtemps quelque auteur.

Il était bien minuit, et tout à coup j’eus peur.

Peur de quoi ? je ne sais, mais une peur horrible.

Je compris, haletant et frissonnant d’effroi,

Qu’il allait se passer une chose terrible…

Alors il me sembla sentir derrière moi

Quelqu’un qui se tenait debout, dont la figure

Riait d’un rire atroce, immobile et nerveux :

Et je n’entendais rien, cependant. O torture !

Sentir qu’il se baissait à toucher mes cheveux,

Et qu’il allait poser sa main sur mon épaule,

Et que j’allais mourir au bruit de sa parole !…

Il se penchait toujours vers moi, toujours plus près ;

Et moi, pour mon salut éternel, je n’aurais

Ni fait un mouvement ni détourné la tête…

Ainsi que des oiseaux battus par la tempête,

Mes pensers tournoyaient comme affolés d’horreur.

Une sueur de mort me glaçait chaque membre,

Et je n’entendais pas d’autre bruit dans ma chambre

Que celui de mes dents qui claquaient de terreur.

Un craquement se fit soudain ; fou d’épouvante,

Ayant poussé le plus terrible hurlement

Qui soit jamais sorti de poitrine vivante,

Je tombai sur le dos, roide et sans mouvement.

Guy de Maupassant   Des vers

À la belle impérieuse

 

L'amour, panique

De la raison,

Se communique

Par le frisson.

 

Laissez-moi dire,

N'accordez rien.

Si je soupire,

Chantez, c'est bien.

 

Si je demeure,

Triste, à vos pieds,

Et si je pleure,

C'est bien, riez.

 

Un homme semble

Souvent trompeur.

Mais si je tremble,

Belle, ayez peur.

Victor Hugo

Les chansons des rues et des bois (1865).

J’ai presque peur, en vérité

J’ai presque peur, en vérité,
Tant je sens ma vie enlacée
A la radieuse pensée
Qui m’a pris l’âme l’autre été,

Tant votre image, à jamais chère,
Habite en ce coeur tout à vous,
Mon coeur uniquement jaloux
De vous aimer et de vous plaire ;

Et je tremble, pardonnez-moi
D’aussi franchement vous le dire,
A penser qu’un mot, un sourire
De vous est désormais ma loi,

Et qu’il vous suffirait d’un geste.
D’une parole ou d’un clin d’oeil,
Pour mettre tout mon être en deuil
De son illusion céleste.

Mais plutôt je ne veux vous voir,
L’avenir dût-il m’être sombre
Et fécond en peines sans nombre,
Qu’à travers un immense espoir,


Plongé dans ce bonheur suprême
De me dire encore et toujours,
En dépit des mornes retours,
Que je vous aime, que je t’aime !

Paul Verlaine, La bonne chanson, 1870

Sommeil

Ton sommeil m’épouvante, il est froid et profond

Ainsi que le Sommeil aux langueurs éternelles.

J’ai peur de tes yeux clos, du calme de ton front,

Je guette, et le silence inquiet me confond,

Un mouvement des cils sur la nuit des prunelles.

 

Je ne sais, présageant les mortelles douleurs,

Si, dans la nuit lointaine où l’aurore succombe,

Ton souffle n’a pas fui comme un souffle de fleurs,

Sans effort d’agonie et sans râle et sans pleurs,

Et si ton lit d’amour n’est pas déjà la tombe.

Renée Vivien  Études et Préludes

Je n’ai plus que les os

Je n’ai plus que les os, un squelette je semble,

Décharné, dénervé, démusclé, dépulpé,

Que le trait de la mort sans pardon a frappé ;

Je n’ose voir mes bras que de peur je ne tremble.

 

Apollon et son fils, deux grands maîtres ensemble,

Ne me sauraient guérir, leur métier m’a trompé.

Adieu, plaisant Soleil, mon œil est étoupé,

Mon corps s’en va descendre où tout se désassemble.

 

Quel ami me voyant en ce point dépouillé

Ne remporte au logis un œil triste et mouillé,

Me consolant au lit et me baisant la face,

 

En essuyant mes yeux par la mort endormis ?

Adieu, chers compagnons, adieu, mes chers amis !

Je m’en vais le premier vous préparer la place.

Pierre de Ronsard

Il avait si peur de la nuit

Il avait si peur de la nuit

qu’il courut s’abriter

dans le verger

et la nuit le suivait.

Il sauta le ruisseau,

traversa la forêt

et la nuit le touchait.

Il se blottit dans le gite d’un lièvre.

Tout près, tout près,

la nuit contre lui tremblait.

Il s’enferma dans le bleu d’une étoile,

dans le cri d’une effraie

et tendrement la nuit l’embrassait.

 

Alors, il ferma les yeux à demi

et la nuit fut en lui.

André Rochedy  1942/2006

Chant d'automne

 

Bientôt nous plongerons dans les froides ténèbres ;
Adieu, vive clarté de nos étés trop courts !
J’entends déjà tomber avec des chocs funèbres
Le bois retentissant sur le pavé des cours.

Tout l’hiver va rentrer dans mon être : colère,
Haine, frissons, horreur, labeur dur et forcé,
Et, comme le soleil dans son enfer polaire,
Mon coeur ne sera plus qu’un bloc rouge et glacé.

J’écoute en frémissant chaque bûche qui tombe ;
L’échafaud qu’on bâtit n’a pas d’écho plus sourd.
Mon esprit est pareil à la tour qui succombe
Sous les coups du bélier infatigable et lourd.

Il me semble, bercé par ce choc monotone,
Qu’on cloue en grande hâte un cercueil quelque part.
Pour qui ? – C’était hier l’été ; voici l’automne !
Ce bruit mystérieux sonne comme un départ.

Charles Baudelaire

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Nos poèmes

RÊVES

 

Pourquoi es-tu revenu

cette nuit ?

Mon calme apparent

s’est enfui.

 

+++++

 

Rêve la nuit

cauchemar le jour.

 

++++

 

Pourquoi cette nuit

m’as-tu donné la main ?

Las, elle est vide la mienne

ce matin.

 

 

SOUVENIRS

 

A quoi bon

te chasser de jour,

tu reviens

par la porte de la nuit.

 

+++++

 

Que faire d’un amour à une face ?

Le rejouer ?

Il est trop tard.

J’ai trop peur ;

Oh, retarder sa pile !

 

++++

 

1kg, 2kg, 3kg, 5kg,

une tonne.

Oh, ce poids

qui écrase mon cœur !

 

Anne GODO, (Caen – 18 septembre 2022)

FENÊTRE SUR LA PEUR

 

La faim se nourrit de peur.

La peur du silence étourdit les rues.

La peur menace.

Le sida, pour qui aime.

Le cancer, pour qui fume

L’épidémie, pour qui respire.

Les accidents, pour qui boit.

Le cholestérol, pour qui mange.

L’attaque, pour qui marche.

La peur, pour qui pense.

La folie, pour qui doute.

La solitude, pour qui ressent

 

 

Eduardo Galeano (Montevideo 1940-2015)

paru le 24 décembre 2016

Traductions : A. GODO – décembre 2022

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Conférence internationale sur la peur

 

Provisoirement, nous ne chanterons pas l’amour

qui s’est réfugié plus bas que des souterrains. 

Nous chanterons la peur, qui aseptise les baisers 

nous ne chanterons pas la haine car elle n’existe pas,

elle existe à peine la peur, notre mère notre compagne,

la grande peur des contrées sauvages, des mers, des déserts,

la peur des soldats, la peur des mères, la peur des églises,

nous chanterons la peur des dictateurs, la peur des démocrates,

nous chanterons la peur de la mort et la peur de l’après-mort,

puis nous mourrons de peur

et sur nos tumuli naîtront des fleurs jaunes et craintives.

 

Carlos Drummond de Andrade (Itabira, 1902- Rio, 1987)

Traduction : Anne GODO, 13 décembre 2022

(Original brésilien sous droits d’auteur)

 Bleu et noir

 

aujourd’hui

le bleu du ciel

broie du noir

au-dessus de la ville

 

avec ses rues vides

ses rares passants

qui s’évitent

 

peu de voitures

le silence

comme une tombe

 

tous les soirs

la télévision

avec son communiqué

 

les morts du jour

les morts sans visage

les morts anonymes

 

furtivement enterrés

 

on croirait lire

une page

de « La peste »

 

avec son héros

le visage

du médecin mort

sur l’écran

 

aujourd’hui

le bleu du ciel

broie du noir

au-dessus de la ville

Bernard Denouel

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 La grange

 

Ils étaient dix-sept

 

Dix-sept prisonniers allemands

étendus sur la paille

 

Ils avaient marché tout le jour

 

Mon père les regardait curieusement

de ses petits yeux gris bleu

 

Havres et hagards ils s’interrogeaient

sur leur sort

 

Un jeune soldat blessé tentait de dissimuler

ses blessures

 

Mon père tendit une cigarette au lieutenant

 

L’officier révéla le soldat croyait

qu’il serait fusillé

 

Le silence se fit peu à peu dans la grange

 

Seuls mon père et le lieutenant parlèrent toute la nuit

 

La colonne se reforma au matin

 

 

Bernard Denouel

 Ô sœurs et frères humains 

 

Ne sentez-vous pas cette odeur fétide de charnier qui monte des profondeurs de la terre ? Ne voyez-vous pas ces nuages noirs qui s’amoncellent dans le ciel ? Ils ramènent à nouveau les morts vers la mer où ils s’enfonceront invisibles. N’entendez-vous pas le retour de ces hommes à tête de rat qui poussent de petits cris gutturaux ? La peste est revenue, celle qui s’infiltre sournoisement dans l’esprit et tue peu à peu la pensée. Ces hommes couvrent la terre entière de murs barbelés. Avec le temps du mépris est revenu le temps de la peur et de l’humiliation. Ils réduisent les mots à leur plus simple expression. Viendront ensuite les bruits de bottes, soyez en sûr.

 

Ô sœurs et frères humains, j’en appelle à votre résistance contre l’oppression qui avance masquée, sans en avoir l’air ! Son alliée : votre peur. Elle gangrène vos esprits peu à peu, elle gagne sans cesse du terrain. Si vous n’y prenez garde, elle finira par vous engloutir. Et vous finirez par croire que votre salut est dans votre servitude volontaire.

 

Un seul chemin possible : empêcher à tout prix que le monde ne se défasse ; secouer ces chaînes avant qu’il ne soit trop tard ; en appeler à la vigilance ; dénoncer toute tentative d’atteinte à notre liberté chérie ; enfin retrouver la voix de la résistance et de la fraternité.

Bernard Denouel

PEUR

Qui a peur du grand méchant loup qui terrifie

Le petit chaperon rouge seul dans la lande ?

L’enfant frissonne et frémit au creux de son lit

En s’enflammant de tous les contes et légendes.

Qui craint le plus grand pirate anglais Barbe noire

Qui multiplie les pillages et les tueries ?

Sur son Queen Anne’s Revenge, il tire sa gloire

Aux Antilles, sur la Côte Est des colonies.

Qui redoute Bloody Mary la trop sanglante,

Sans pitié, la fière héritière des Tudor ?

Frêle Lady Jane Grey vraiment très charmante,

Décapitée, sa jeune tête frissonne encore.

Qui meurt de frayeur devant Yvan le Terrible

Monstre de cruauté, tsar cruel empaleur ?

Novgorod la Grande s’effraie de l’irascible

Qui tue tous les nobles, fait régner la terreur.

Qui fuit devant le comte vampire Dracula

Brute sanguinaire, qui répand feu, sang et mort ?

La victime sur son pal, prie le Walhalla,

Tandis que le monstre s’abreuve dans son fort.

Qui tressaille aux cris de la vouivre dans les fonds

Où brûlent les curieux de sa langue de feu ?

Une escarboucle brille à son front de dragon

Que convoitent avec ses trésors les malheureux !

Brigitte Vivien

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Pour déjouer la peur, j’entre dans un bistrot

me taper un café avec une tartine

J’y vais le soir aussi pour siffler ma bibine

Et d’autres fois encor mais pas trop mais pas trop !

 

Pour voyager toujours j’emprunte le métro

Avec d’autres quidams ensemble on s’agglutine

Ça se bouscule un peu  Beaucoup ça se piétine

L’angoisse est là-dessous mais pas trop mais pas trop

 

Il faut bien vivre un peu dans ce climat putride

Et ne pas s’enfermer devant son grand écran

Où l’on voit jour et nuit du sanglant du morbide

 

De l’atroce du glauque et puis surtout surtout

Sur un ton sentencieux (ce qui me met à cran)

Des chroniqueurs imbus qui savent tout sur tout !*

 

Christian Laballery

*Sonnet écrit après les attentats de novembre 2015

Peur

 

 

La peur

étrange peau vêtement étrange

elle nous ajuste au monde à son gré

 

crainte ou appréhension

elle nous laisse une certaine distance

elle fait rôder autour de nous

de vagues dangers réels ou fantasmés

 

peur maquillée de bleu ou de blanc

elle suscite des menaces

qui nous frôlent en frissons vénéneux

ou se tapissent dans notre dos

 

effroi ou terreur

elle nous saisit dans ses filets froids

dans ses crispations et ses paralysies

elle nous étouffe parfois jusqu'au « trou noir »

possible au bout de l'insupportable.

 

 

Daniel-Claude Collin / janvier 2023

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                                                                                     J’AIMERAIS

Ne pas avoir la peur de vivre

La peur d’affronter mon destin

Etre debout fière et libre

Renouveler tous mes matins.

 

 

                                                                                     J’AIMERAIS

Que mon cœur batte fort, qu’il vibre

Et ne conçoive noirs dessins

Que de la peur il se délivre

Echappe à tous les baratins.

 

 

                                                                                     J’AIMERAIS

Demeurer en bel équilibre

Nu-pieds ou dans mes mocassins

Etre en liberté et ivre

De vie,  de joie jusqu’au mot  « fin ».

 

                                                                                   

                                                              Danièle MANOURY

CAEN LE 23 JUIN 2022

                                                                          CHAQUE SOIR……                

 

 

 

Chaque soir, le soleil faisant sa révérence,

Etincelle du feu des forges de Vulcain.

Son halo lumineux jusqu’à la transparence

Revêt d’or et de sang notre horizon lointain.

 

 

Etincelle du feu des forges de Vulcain,

Le cycle perpétuel qui le soir recommence

Revêt d’or et de sang notre horizon lointain,

Allume l’air ambiant d’un incendie immense.

 

Le cycle perpétuel qui le soir recommence

Emprunt de la magie des rites sacro-saints

Allume l’air ambiant d’un incendie immense,

Soudainement vacille, faiblit et s’éteint.

 

 

Emprunt de la magie des rites sacro-saints

Le jour, flottant drapeau dans son évanescence,

Soudainement vacille, faiblit et s’éteint.

La peur, alors étreint les êtres sans défense. 

 

                                                                                  Danièle MANOURY

CAEN LE 13 JANVIER 2014

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LA PEUR DE MA VIE 

 

Dans la nuit

l’alarme se déclenche

la peur me saisit !

Un voleur s’est introduit …

 

où suis-je ?

La peur me paralyse

coup d’arrêt !

L’angoisse se déclenche

me nuit – me suit

m’empêche d’avancer

 

mes jambes flageolantes

mes mains tremblantes

je prends mon pistolet

je descends l’escalier

 

coup de pied dans la porte

je cherche le voleur présumé

où s’est-il caché ?

Aucun bruit

 

 

mon cœur…

 bat à IOO à l’heure

quelle horreur

d’attendre de la sorte

je flanche

blanche

 

je me vois

je réalise

moi, en chemise de nuit

mon pistolet au bout des doigts

… et la peur s’en va

 

je ris,

une petite souris

dans la nuit

joue à tout est permis !    

 

 

Danydeb

05   01  2023

La forêt

La forêt a peur.

les arbres paniquent,

le bouleau tremble,

le saule pleure,

le chêne craque son écorce,

le pin saigne sa plaie au flanc,

les feuilles arrachées vont à la rivière

se trouver un autre destin.

Et moi le tout petit pinson

auquel le vent vole les plumes,

vole le nid,

vide le bec,

J’assiste et je compose avec

la vie encor qui me palpite ;

la sève encore qui gravite

Des racines à la canopée ;

Le bourgeon à la dérobée

Qui peaufine sa fleur naissante

au cœur même de la tourmente

sans savoir pourquoi il le fait.

Et je m’adresse à la forêt :

Quel que soit le monde ou le sort,

l’espoir est toujours le plus fort,

il faut le chercher où il est

dans son cœur ou dans la forêt.

Moi le pinson qui vais mourir

Tandis que tu vas reverdir.

je m’acharne et je m’égosille

À partager mon dernier trille :

Qui que tu sois, où que tu sois

l’espoir ne dépend que de toi.

Irène Gaultier-Leblond

4 janvier 2023

La peur est la

La peur est là,

peur sur la mer,

au bout des plumes de l’oiseau

mazouté au long du bateau.

La peur et là,

peur sur la mer

engluée de noir et d’amer,

par la honte et par l’avanie,

Par les hommes !

Ceux qui là-bas sitôt sont repartis

vers la course et vers le profit

Tandis que pour nourrir l’enfant

le pécheur n’a que son tourment.

La peur est là,

Peur longue comme

l’amnésie coupable des hommes

Irène Gaultier-Leblond

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Peur bleue

 

Tu viens d’avoir, m’as-tu dit

une peur bleue, samedi ?

S’agit-il d’un incendie

ou de quelque maladie,

peut-être un accident ?

Je te sais pourtant prudent.

Alors, rassure-moi vite,

dis-moi ce que tu évites.

Mais, au fait, pourquoi dis-tu

que BLEUE elle t’a paru ?

Bleue comme notre planète

ou comme un beau jour de fête,

bleue comme un grand ciel d’été

ou comme au champ, le bleuet.

Ne pouvait être mortelle

une peur rendue si belle.

Je cesse d’être apeurée

et me voilà rassurée.

 

Jeanne FOUCHER   Janvier 2023

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Se faire peur ?

 

Les films d'horreur font le plein.

Il semble que l'on ait besoin

De se faire peur, "pour de faux"

Pour s'en vacciner au plus tôt.

 

Se rassurer à peu de frais,

C'est en tout cas ce qu'il parait,

Faisant penser qu'à cette heure

On ait surtout peur d'avoir peur !

 

 

Julie - janvier 2023

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  La peur gagnera-t-elle ?

 

 

La Peur amène vigilance

Elle peut aussi paralyser...

Faudrait un peu de tempérance

Si vous voulez me motiver.

 

Tout va très mal ! J'ai bien compris.

Mais à force de m'effrayer

Je vais rester dans mon lit

Et ne plus rien écouter.

 

Pourtant vous avez bien raison,

Faire comme si de rien n'était

N'est vraiment pas la solution...

Et si ma flemme j'y cachais ?

 

"Agir"est la meilleure façon

De conjurer un peu la peur.

Au lieu de tourner en rond

Attaquons-nous au malheur.

 

Ensemble, si nous inventions

Une réponse aux destructeurs ?

Et que belle cohésion

Fasse peur, à la peur ?....

 

Julie - Janvier 2023

    HURLEES  DEPUIS UNE CAVE

 

 

je n'aime pas à redire des aventures déjà longuement contées

                                             Homère Odyssée

  

 

 

puis- située desnos- aorte- la folie vint frapper à ma porte

en foule furieuse

mais ses yeux immobiles ne trahissaient que mes paupières trop longues à délivrer leurs pupilles

 l'ange étreignant le démon ( petite neutralité phénoménale....) la porte s'enfuit d'un bond par la fenêtre encor sonore de sa claustration réflexive

à l'angle de raison priant des larmes que les yeux n'offrent que pour se clore que sur le vide qu'elles invoquent l'angle de la folie tisse des voiles

          ailes dont elle enserre l'envol

          suaires dont elle couve le rêve apaisant

 

 

son visage calculait l'infinité des rondes qui l'observaient

se masquait de ricochets de nombres pour mieux me faire

saillir l'évidence qu'il m'offrait de l'illusion de ses miroirs

                                                    de son illusion de miroirs

 

 

donc raison et folie invoquèrent les portes de leur absolu et les limites de leur gouffre

et embrassant leurs clefs invisibles- ce sont dés- enfantèrent de cadavres gais à renaître enfin de tableaux dédiés au temps prisonnier

 

 

la folie me déroba en ses bras de dés hagards sur couche sûre et propos ivres de tartufferies inconnues-

 

 

de l'enfant bègue ainsi consumé ne naquit point la candeur d'un cerveau d'hermaphrodite

 

 

car la raison se rassure salue et prosterne sans honte tout son élan absurde qui croît aux bontés des sombres choses

 

 

libertaires distillations sous croix absolutrices des pénombres de caves stratégiques où s'écrivent des sortilèges à oublier qui les divise en strates mythiques sont révélées à vos sillons vainqueurs légères semaisons ou frondes habituelles muchées sous des déliquescences

 

 

aux trottoirs temporisés de marches dédaigneuses ou ahuries de trop de ce monde l'éclairage noctambule de la lune et des lampadaires – ô vrai divin bec- de- gaz d'où N salua la rue errante - s'agace à l'échec des ombres qu'ils fécondent (enlassées)

 

 

or tel pas s'inonde les vices diurnes dans la clarté amère de l'une le cycle errant de l'autre en prières de révolutions sages, s'évertuant en muettes coupes démonstratives, tel autre péripatéticien du doute aux roses invisibles s'amuse à recueillir les larmes à – venir                     que brumes matinales (ou festins païens) déclament aux pétales assombris l'un miracle à créer, à ne renâcler de la corolle que pour s'instruire de végétales multitudes

aussi quittons les routes- mêmes disent- ils en somnambules prévenus du pire afin de délivrer d'une lumière inopportune celles que maîtresse Nature et maîtresse Ordonnatrice s'égayent l'une l'autre à ne point enrober d'un orbe impie

                                          qu'une matière incertaine d'elle- même hésiterait en marche à qualifier de consolatrice solitaire

 

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nous feignons des largesses de valets

eux

       cœurs calmes

                               demeurés dans le silence de leur

                               titilleuse promesse de paille

on les lange on s'y promène à masquer d'amours complexes cette peu vaine supplique à s'y montrer l'auteur

 

 

voici                          conséquenses d'âme au service 

                                  d'âmes conséquentes

ce que ces rats bifurquent de lignes droites pourtant ponctuées de murs en ces caves- bas- fonds où l'écritoire s'insurge contre des pans cogneurs de livres ouverts et de vertus interminables-

                                    des complexes de déserts où mourir de soif innove la pensée d'une rencontre fortuite de détrousseurs de songes

 

            

               ... - au gare urgent du temps passif-

errant des pieuvres affolées               des peaux fumantes         

       des mains captives de leur objet

quand les peaux hurlent des visages tombent dans le vide en sacrifiant l'unique offerte d'eux aux regards neutres d'une horloge

 

 

 

...   à la blamante éternité ou au vide si elle meurt ou console les aveugles- frappons la fulminante de leur souffle de non- matière

 

 

un marteau tel le temps l'exige/ qu'on ne retrouve force creusements et sueurs quasi métaphysiques/ ou

                                                                              modestes

en artisans certains d'outils peu conformes à l'érosion de l'engeance maître

 

 

pourtant certains d'entre eux s'allongent volontiers sans un autre à l'ombre des clartés naturelles pour en mieux saisir la complexité du déroulement

puis d'autres

                       des mêmes

                                           moins sûrs

                                                               plus policés

                habitués à la folie de la Grande Roue

 

cessent de frotter leur art brutal aux êtres mobiles de ce monde, préférant compter les œuvres qui se sont égarées sur l'enclume et les restituer comme des parties extérieures à eux- mêmes

  

  

(pour une conclusion des simples)

 

 

qui abolit le mot cercueil

de son poème ne peut mourir

si l'être est tu devienne un ange

sa volupté de texte lu

                                   ailleurs

qu'en source temporelle et circulaire

ce nègre fabricant d'un lieu sans corps

ni prière damne le temps

d'un soubresaut de couche nue

si celle qui nie et absout

le féminin de sa naissance

l'aile pâtit de son envol

pour mieux s'y taire en fleur viride

aux nuages reçois

d'une main qui s'efface en l'offrant

ce bouquet d'une d'où naquit

toute la beauté de son silence

Ludovic Duclos

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Peur

Au cœur de la peur

Ciel gelé, tomber sur la tête

Un brin d’immortels

 

Sur des chemins pieux

Bouleversés menés hors temps

Une série d’angoisses

 

D’ailleurs ou là-bas

Soleil dévore, cœur brisé

La nuit submergée

 

Le destin noir-ange

Météorites noient de peurs

L’horizon mystique

 

Mariama ANGATAHI (Maaar)

Une peur bleue

comme le chemin bleu

de mes promenades

le ciel bleu

de mes vagabondages

les nuages bleus

de mes rêves et songes

le bleu azur le bleu grec

bleu voluptueux merveilleux

alors pourquoi

la peur est-elle bleue ?

 

Marie-Paule Demont

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Peur de tout

peur des coups

effroi de toi

 

Marie-Paule Demont

Quelle frousse

dans la brousse

toute rousse

mon chemin je rebrousse

ouf

de l’air

et de quoi ai-je l’air

avec cette peur

à effrayer toute une bande

de batailleurs

Marie-Paule-Demont

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                  Terreur nocturne

 

La porte de l’armoire est restée entrouverte,

Un rai de lune joue sur des objets brillants,

Il croit apercevoir les deux yeux scintillants

D’un monstre épouvantable acharné à sa perte.

 

Il serre contre lui sa douce tortue verte

Qui sait le protéger contre tous les méchants,

Chimères et dragons, vampires terrifiants

Tout prêts à lacérer sa tendre gorge offerte.

          

Sa Maman, par bonheur, allume la lumière,

Alors s’enfuit d’un coup la horde meurtrière

Il peut dormir enfin, la chambre n’est plus noire.

 

Un jour, il lui faudra sortir de sa torpeur,

Rassembler son courage et affronter sa peur

Puis chasser à jamais les hôtes de l’armoire.

Martine Desgrippes Devaux

                   Matin chagrin

 

 

En plein cœur de l’hiver, un jour blafard se lève,

Un léger bruit fâcheux pénètre mon sommeil

Inexorablement. Je m’arrache à mon rêve

Et dérive à regret aux abords de l’éveil.

 

Mais la réalité soudainement m’accable

D’un sentiment diffus de danger imminent.

Le pire cauchemar me semble préférable

À cet étrange émoi qui revient, lancinant.

 

Comme un grand oiseau noir terrorise sa proie,

Une ombre menaçante obscurcit l’horizon.

L’angoisse qui, toujours, anéantit la joie

Dans mon esprit troublé distille son poison.

 

Sans cesse, elle m’étreint, sournoise et obstinée,

Souillant sans compassion le bonheur aboli,

Et s’attache à mes pas au long de la journée.

Alors, j’attends la nuit qui m’offrira l’oubli.

Martine Desgrippes Devaux

La peur du gendarme …

  

La crainte du gendarme est, dit-on salutaire,

Je vais en quelques mots démontrer le contraire.

Un garçon qui venait de passer son permis,

Avant que le sésame, enfin, lui soit remis,

Acheta le jour même une jolie voiture

Et puis, sans l’assurer, partit à l’aventure.

Des képis, au rond-point, suscitèrent sa peur

Il fit donc demi-tour pour son plus grand malheur.

Mais la maréchaussée, se montrant fort sagace,

Entreprit aussitôt de lui donner la chasse.

Bien vite rattrapé, le jeune homme ne put

Présenter des papiers qu’il n’avait jamais eus.

« Rouler sans ton permis et sans ton assurance

Te vaudra, mon gaillard, très lourde contredanse ! »

Ainsi parla l’agent, et le pauvre garçon,

Redevenu piéton, en tira la leçon :

Il aurait dû passer tout droit avec audace,

Et il ne serait pas aujourd’hui dans l’impasse.

Martine Desgrippes Devaux

Le trac.

 

 

Tout acteur chevronné connaît ce mal étrange

qui le saisit soudain derrière le rideau,

juste avant les trois coups, ce gène qui dérange,

ce trac abominable à glacer le cerveau.

 

Par un trou minuscule, il regarde la salle

pleine à craquer d’un monde impatient de voir

le spectacle annoncé, nommé « la Générale »,

qu’il lui faudra jouer au théâtre ce soir.

 

Un sentiment de peur le paralyse au ventre

et, bien malgré le fait d’avoir cru maîtriser

tout du scripte et du rôle auquel il se concentre,

il appréhende encor ce moment malaisé.

 

Cependant, une fois que s’éteint l’éclairage

et le rideau se lève au-dessus du plateau,

le stress alors banni, tel charmé par un mage,

l’artiste trouvera sa maîtrise aussitôt.

 

Michel BARTHA May-sur-Orne, le 23 décembre 2022.

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Complainte pour de grands hommes

 

L’univers de Zola, en mon adolescence,

Me transportait, ailleurs, dans l’espace et le temps.

S’il peuplait mon esprit, avais-je bien conscience,

Que certaines fictions perduraient, au présent…

 

Ma complainte s’élève, du fond de ma mémoire …

Je vous ouvre mon cœur pour saluer d’un hommage,

Des hommes nobles et forts, appelés « Gueules noires ».

A me souvenir d’eux,  humblement, je m’engage. 

 

Alors que je jouissais d’une existence en or,

De braves ouvriers, ombres de Germinal,

Travaillaient en souffrant, dans les mines du Nord,

A la triste lueur d’une lampe frontale.

 

Les laissant prisonniers, les portes d’ascenseur,

Dans un claquement sec, sur eux, se refermaient…

Le grisou meurtrier entretenait la peur.

Comme sonne le glas, les outils résonnaient… 

 

L’horrible silicose agressait leurs poumons…

Et privés de clarté, au plein cœur de l’hiver,

Affaiblis, mais vaillants, galibots* et porions*,

Ne pouvaient espérer qu’un destin éphémère !

 

Ils descendaient si bas, à l’instar d’un naufrage,

Sous la loi du hasard, se livrant à leur sort…

Généreux et soumis, ils fuyaient le chômage,

Le visage noirci, risquant souvent la mort.

 

D’une page d’Histoire, tristes réminiscences,

Dans les puits caverneux, se succédaient les heures…

Chacun devait livrer de lourdes performances,

Hanté par l’inquiétude, le deuil et le malheur.

 

En s’armant de courage et dans la dignité,

D’une vie héroïque, ils honoraient leurs  jours…

Je leur dois un respect hautement mérité. 

Puissent nos voix, en chœur, leur offrir notre amour !

 

* porion : contremaître - *galibot : jeune manœuvre

Monique Renault

SUCRE AMER

 

Nous parfumons le thé avec du sucre roux…

Ces petits grains précieux cachent des  vitamines,

Quelques sels minéraux, et flattent notre goût

Pour tant de vanités, d’autres ont courbé l’échine!

 

Frappés, martyrisés, et vendus aux enchères,

Sous le regard féroce de violents commandeurs,

Dont les coups redoublés,  avaient meurtri leurs chairs,

Des esclaves mouraient, dans les larmes et la peur !

 

Des bateaux affrétés d’un cruel arsenal,

Pour un commerce honteux d’Africains innocents

Qui gisaient sur le sol, enchaînés dans la cale,

Partaient vers les Antilles, où attendaient les Blancs.

 

Comme des criminels qui toujours récidivent,

La couleur de leur peau signait leur avenir.

Et de la canne à sucre, les vertus lucratives,

Réjouissaient les planteurs  aux cupides délires.

 

Notre Europe, il est vrai, fut l’actrice effroyable

De ces massacres-là, au parfum de racisme,

Au nom d’une saveur,  d’un négoce rentable,

Engagée sans égards, dans l’odieux  cataclysme !

 

Odieuse et inhumaine, sur l’île de Gorée,

La traite négrière assassina la vie…

Tant de destins brisés, tant de jours à pleurer,

Mais pouvons-nous crier que tout est bien fini ?

 

L’espoir me réconforte, quand le passé m’affecte !

Des peintres et poètes ont laissé une trace,

Dénonçant les excès des idéaux abjects…

Gloire à l’engagement et gloire à leur audace !

 

Les mots d’Aimé Césaire ont gravé une empreinte…

La voix de Boris Vian ne s’élèvera plus,

Et celle de Senghor, doucement, s’est éteinte… 

Faisons que leur mémoire ne soit jamais perdue !

                                           

*Gorée : île du Sénégal-        

                                                     

Monique Renault

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Tout à coup la nuit monte

Une longue vague vers le ciel

Un frisson lent tissé d’étoiles

Elle répand l’encre de nos peurs

Borde le lit de nos insomnies

Suprêmement s’installe

Indifférente aux rêves qu’elle cisèle

Souveraine

Tellement obscure

Puis elle se tait soudain

Et consent enfin à l’attente de l’aube

 

Véronique Garrigou

C’est un jardin

C’est un jardin traversé d’ombre et d’innocence

Des fruits lourds qui font trembler les arbres

C’est une certaine qualité de silence qui s’offre au vent et à

l’eau claire           

C’est un ciel matinal, pur, aiguisé comme une lame

C’est une maison ouverte où les escaliers craquent

Un livre abandonné sur une table

Un chat qui rêve en plein soleil

C’est la nostalgie de la mer

La perte de l’horizon

Les voyages dont on rêve comme on rêve d’insouciance

Les voyages qu’on ne fait jamais

Le clair-obscur des églises quand on ne sait pas prier

Deux bateaux qui se croisent et qui n’en font plus qu’un

 

C’est un jardin

Traversé d’ombre et d’orage

Un bruissement de feuilles comme une robe qu’on froisse

Des nappes blanches sous les tilleuls et des enfances qui se

racontent

Ce sont des siestes

Des nuits

Des faux-départs

Des verres renversés, des fenêtres qui claquent

C’est la régularité d’un rythme, une brutale envie de mots,

nos pas sur les chemins

Une marée haute

Une marée basse

Et le sable si nu que les vagues ont lissé

Ce sont des visages, des bouches, des yeux

La violence des corps au creux même des soupirs

Et la main qu’on caresse avant qu’il soit trop tard

 

C’est un jardin

Une fillette en robe claire y fait quelques pirouettes

Et la nuit peut tomber

On n’a plus peur de rien

Véronique Garrigou

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