L'instant poétique

Quelques citations

Il y a dans la vie des instants de bonheur qu'aucun poème ne peut résumer. Jean Tétreau
L'avenir à chaque instant presse le présent d'être un souvenir. Louis ARAGON
L'obsession de l'ailleurs c'est l'impossibilité de l'instant ; et cette impossibilité est la nostalgie même. Emil Michel Cioran
L'amour est une ortie qu'il faut moissonner chaque instant si l'on veut faire la sieste étendu à son ombre.
Pablo PICASSO
Chaque instant est bonheur à qui est capable de le voir comme tel. Henry MILLER
L'instant où l'on découvre son propre manque de talent est un éclair de génie. Stanislaw Jerzy Lec
J'ai un copain, il est pilote d'essai... enfin, il ne l'est pas encore ; pour l'instant, il essaie d'être pilote ! Raymond DEVOS
Le rythme de la vie moderne ne nous permet pas de nous arrêter un instant sur le bord du trottoir de l'existence. Pierre Dac
La vocation de la poésie n'est pas de nous éblouir par une idée surprenante, mais de faire qu'un instant de l'être devienne inoubliable et digne d'une insoutenable nostalgie. Milan KUNDERA
Remède. agent thérapeutique qui guérit rarement le mal qu'on a mais donne à chaque instant un mal qu'on n'avait pas. Georges Courteline
Nos poèmes



La tristesse d'un soir
au jardin soudain
le parfum du lilas
Sur la page bleue du ciel
le frémissement d'une écriture
un vol d'étourneaux
Lentes dans la brume
les quatre biches délicates
mon cœur en suspens
Une pluie d'étoiles
sous le silence du ciel
un chevreuil s'ébroue
Une palpitation de l'air
un petit éclat de ciel
le vol d'un papillon






ECLIPSE
L’espace d’un instant - Un instant dans l’espace
Astronomes, chasseurs d’images insolites,
Pour saisir une éclipse, au cœur du firmament,
S’équipent de lunettes, et s’empressent bien vite,
De monter une garde, ciblant l’évènement !
La météo annonce un temps clair et serein…
Les nuages, aujourd’hui, ont déserté l’espace,
Chacun se dit alors, qu’il verrait, c’est certain,
Ce phénomène étrange dont on guette la trace.
La reine de la nuit approche à pas de lune,
Gourmande, elle grignote, peu à peu, le soleil,
Qui se laisse embrasser, ainsi va sa fortune,
Tel un amant comblé, à nul autre pareil !
Quand le ciel s’assombrit, que s’éteignent les feux,
La foule rassemblée, levant le nez en l’air,
Comme si le Cosmos répondait à ses vœux,
Toutes ailes déployées, se fond dans l’Univers !


LE SOURIRE ARRÊT SUR IMAGE
Le sourire, sur vos lèvres, illumine mes yeux,
Se pose sur mon cœur, en proie à la détresse.
Comme une douce étoile qui brille dans les cieux,
Il éclaire ma nuit d’une aimable caresse.
Il apaise l’esprit et le corps des malades,
Embellissant l’instant d’une lueur d’espoir.
Tel un soleil qui perce un ciel bas et maussade,
Il colore la vie et il gomme le noir !
CAPTURE D’IMAGES
Quand je scrute partout la vie que je capture,
Je vénère Doisneau et j’honore Lartigue.
Je ne puis résister à tenter l’aventure,
Car la photographie me fascine et m’intrigue !
Personnages en scène, panoramas, portraits,
Mes clichés impatients viennent s’amonceler…
Ô ! Raymond Depardon et vous, Brassaï, Man Ray,
J’aime l’Art de l’instant que vos œuvres ont scellé !
Les années ont passé ; voici le numérique
Qui offre, à tout jamais, du bonheur à nos yeux…
Nouvelle technologie, mais non moins poétique…
Savourons désormais, ces moments délicieux !
« Le souvenir de ces moments est ce que je possède de plus précieux, peut-être à cause de leur rareté, un centième de seconde par-ci, un centième de seconde par-là, mis bout à bout, cela ne fait jamais qu’une, deux, trois secondes chipées à l’éternité.»
Robert Doisneau



Tri sélectif
Sorties du sèche-linge, un amas de chaussettes
Sèches et archisèches au fond de leur bannette
Attend que je les trie pour faire place nette.
Mais bien les apparier relève du casse-tête.
Cette corvée m'ennuie et puis pour être honnête
J'aimerais mieux écrire une belle odelette
Ou même préparer une bonne omelette.
Mon moral qui déjà n'était pas à la fête
Sans mauvais jeu de mots sombre dans les chaussettes.
Noir clair ou gris foncé ? Les distinguer m'inquiète
Celle-ci a un trou, il faut que je la jette
Ce motif amusant me paraît obsolète ?
Il faudra sûrement que bientôt j'en rachète
Et que la broderie soit un peu plus discrète.
Je vois que ces deux-là portent des étiquettes
Mais pour les comparer, il me faut mes lunettes.
Le tas s'épuise enfin et ma joie est complète
Mais soudain c'est le drame, il manque une chaussette !
Il me faut sans tarder entreprendre une enquête.
Amour de printemps
Cherchant à repousser la froidure et ses drames
Un timide printemps embellissait le ciel
D’un généreux soleil qui réparait les âmes,
Et la vie, ce jour-là, avait le goût du miel.
Soudain, je l’aperçus, au détour d’une allée :
L’homme était sculptural, comme seuls sont les dieux,
Sa très grande beauté me captiva d’emblée,
Son visage parfait ensorcela mes yeux.
Il était avenant et de haute stature,
La lumière, extasiée, le nimbait de clarté
Et jouait à loisir sur sa musculature,
Tout son corps irradiait la sensualité.
Contemplant sans pudeur sa nudité glorieuse,
Je doutais cependant qu’un beau jour il m’aimât,
Et je dus m’arracher à sa vision gracieuse.
L’homme resta de marbre et le musée ferma.


L’inspiration.
L’instant d’avant c’est la routine :
la vie avec ses quotidiens...
Je me promène, je bouquine,
je travaille ou je vais, je viens.
C’est ce qu’on nomme d’ordinaire
l’état « normal » d’un être humain
au cheminement linéaire
et sans fantaisie en sous-main.
Mais parfois mon regard s’enflamme
lorsqu’il se pose par hasard
sur une fleur, sur une femme
qu’il butine en bourdon musard.
Alors, jaillissant par centaine
du puits dérobé de mon cœur,
les mots, d’une voix incertaine,
se mettent à chanter en chœur.
Leur chant forcit, s’ordonne et fuse,
quittant l’espace intérieur,
en hymne de gloire à la Muse,
ma bienveillante et grande sœur !
Michel BARTHA : May-sur-Orne, le 11 octobre 1993.
Son et lumière.
Silence ! On tourne aux studios du monde.
Metteurs en scène et stars, avec faconde,
peuplent de tant de rêves les écrans !
Pour rendre hommage aux deux frères Lumière,
en souvenir du soir de leur "première",
le cinéma célèbre ses cent ans.
D'abord lanterne aux magiques images,
en noir et blanc, il affronta les âges,
muet, mais plein de dons ensorceleurs,
pour devenir, de façon coutumière,
fête ou spectacle, aux airs "son et lumière",
dès qu'il finit par prendre des couleurs.
Renoir, Carné, Truffaut, Lelouch et d'autres
étaient ou sont aujourd'hui ses apôtres...
Auguste et Louis, lorsqu'un tournage part,
restent toujours le label de la France,
de festival en "dernière séance",
sous les "sunlights" brillants du septième art.
Michel Bartha : May-sur-Orne, le 19 mars 1995.


Un instant poétique.
Rien mieux qu’un haïku ne retiendra, sans doute,
cet instant poétique, ô combien fugitif,
qui m’a fait déboucher, au bon gré de ma route,
sur un petit ruisseau dans l’air encore vif.
Saisir en peu de mots dans les reflets de l’onde
cet éclat rare et bref disparaissant sitôt,
est le rôle majeur de ces vers seuls au monde
capables d’en brosser, avec art, le tableau.
Grâce à ces textes courts, de moments éphémères
resteront à jamais épargnés par l’oubli
en retrouvant toujours leurs charmes millénaires
chaque fois qu’un lecteur les découvre et les lit.
Michel BARTHA : May-sur-Orne, le 20 septembre 2023.
Le magicien
L'était une fois, un mal aimé,
Un oublié d'humanité.
La clé du monde lui appartient,
Notre destin entre ses mains...
On aime rêver d'Avenir,
Du Passé pour rajeunir.
Quant à l'Instant, qui le repère ?
Il est tellement éphémère...
"Instant présent", l'appelle-t-on,
Pour lui donner un peu d'aplomb.
Afin de le différencier
Des instants du temps passé...
Le Présent est seul créateur,
C'est un moment révélateur
Où le monde est entre nos mains.
Où l'Instant devient magicien..
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Saisir l'instant comme un trésor
En goûter tous les accords
Sa palette multicolore....
Gai ou triste, il a son apport.
Et surtout savoir l'accueillir
Comme matériaux pour construire...
Le monde entier est en suspens
De ce qu'on fera de l'Instant.
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Julie - Octobre 2023


INSTANTS
L’instant ? Une parcelle fugitive
d’éternité.
Clin d’œil fugace ou intuition furtive
de la beauté.
L’artiste, peintre ou poète s’avive,
mais il se tait.
L’éclair cisaille le ciel en dérive.
Anxiété.
Ce navire si lointain enfin arrive
Tant espéré !
Une idée vivifiante en nous native.
Sérénité.
Instant : en ta nature sélective,
brièveté…
tu déroutes notre vision rétive
d’où nos regrets
Jeanne FOUCHER Octobre 2023

Ces instants furtifs
aussi brefs qu’un haïku
parcelles de vie.
Instant palpitant
tel l’oiseau au bord du nid :
premiers pas d’enfant.
Une aube timide
prélude à la jeune aurore.
C’est l’instant de grâce.
L’instant est propice
au réveil du tout vivant :
Naissance d’un jour.
Baignée de rosée
un instant l’herbe frissonne.
Sourit une fleur.
Jeanne FOUCHER Octobre 2023


L’instant de poésie
L’instant de poésie est là
quand les mots sont au bout des doigts,
quand les mots sont au bord du cœur
et qu’ils débordent sans pudeur,
sans mesure, ni fard, ni frein
autre qu’un goût qui m’appartient.
Coule alors ma peine ou ma joie
délivre-toi délivre-moi.
L’instant de poésie est là
Quand je suis seule et que m’échoit
le plaisir unique du choix.
Irène Gaultier-Leblond 13/10/2023

L’instant
Un son – un geste
la respiration s’arrête
en un instant
l’esprit, le cœur guette
l’instant ou tout danse
ou tout commence
dans l’instant de grâce
d’une minute qui passe
et que la vie recommence
instants après instants
tout est si différent
avant – maintenant
comme dans une danse
le souffle court
le corps lourd
la respiration reprend
son cours, normalement
en revue je passe
ce changement, de Grâce
je suis vivant(e)
si lasse si lasse
mais la vie j’embrasse !
Danydeb (2023)

BONHEUR
Il vient de passer l’instant
Du bonheur dans ton pays
Si tu cours, si tu cours vite
Point ne le rattrapera.
Tu ne cours pas assez vite
Le bonheur dans ton pays
Certains l’ont vendu très cher :
Tout pour eux et rien pour toi.
C’est « le petit cheval blanc » *
Le bonheur dans ton pays
Un éclair l’a foudroyé
L’emportant un jour d’été.
C’est « le bonheur dans le pré » **
Cet instant dans ton pays
« Cours-y vite, cours-y vite
Cours-y vite ! Il a filé » **
Mais c’est « le dormeur du val » ***
Le bonheur dans ton pays
Il rêve en paix transpercé
« Deux trous rouges au côté droit »
* Le petit cheval blanc de Paul Fort
** Le bonheur de Paul Fort
*** Le dormeur du val d’Arthur Rimbaud
Danièle MANOURY CAEN le 28 MAI 2023


APHASIE
Comme l’instant instantané
Du Nescafé
Un maelstrom dans une tasse
Telle une valse
Il est passé l’instant précieux
Tout près des cieux
« Elle a passé le jeune fille » *
Vive fleur brille
Alors tomba sur poésie
Voile, aphasie
* Une allée du Luxembourg de Gérard de Nerval
Danièle MANOURY CAEN, le 23 SEPTEMBRE 2023
Poésie de l'instant
P...
hé !
je...
Po...
mais...
quoi !
Poé...
oh !
Déjà !
Poés...
enfin ? !
ben...
Poési..
.ah !
si vite ?
Poésie...
non ?
non !
La poésie s'est défilée à l'instant
elle s'est enfuie
et a vidé en un éclair
la tête qui la convoitait
dérobade météore comète fusée feu-follet
poème étranglé
à peine esquissé en un maigre filet
Daniel-Claude Collin / octobre 2023



Cueillir le jour
Parti à l’orée du printemps
toi qui chaque matin cueillais le jour
Je te connaissais grâce aux yeux de l’amour
Tu ressemblais à un arbre solide
le chêne d’une forêt primitive
Ah tu l'aimais cette vie en dépit de tout
toi qui voyais la terre non pas comme un terrien mais comme Eluard avec son orange bleue
Tu espérais un monde meilleur
que ce monde de bruit et de fureur
Loin de tes combats désormais tu reposes tranquille parmi tes montagnes au ciel incomparable
Tu écouteras le chant du vent dans la douceur des soirs
quand le soleil s’éteindra peu à peu
au fond de l’horizon
Instant volé
C’est l’été à Zelezowa Wola
Il fait chaud les oiseaux sont muets
Aucun souffle dans l’air
pas un frémissement dans les arbres
Assis sur un banc
bercés par l’écoulement régulier
de l’eau du bassin nous somnolons
Soudain comme la pluie bienfaisante
sur un champ de blé brûlant
les notes de Chopin
Par la fenêtre ouverte
Ô cet apaisement cette respiration de l’âme


La lune sa magie
La lune au-dessus de la ville n’est jamais là où on l’attend
On dirait qu’elle joue avec la nuit
Toute ronde elle inonde les trottoirs de sa lumière
Comme une pluie de printemps
Une autre nuit elle devient simple croissant sur le fil d’un rasoir
Voire lune furtive cachée derrière de sombres nuages
Parfois c’est le noir plus de lune un rideau de théâtre
Tombé sur la ville
A cet instant seules demeurent sur la terre les lumières des hommes
Celles qui cachent le ciel le suppriment en quelque sorte
On guette longtemps on attend on espère le retour de la lune
Tranquille l’astre de la nuit réapparaît toujours au milieu
De son océan d’étoiles
La mer la nuit
La mer la nuit
La mer la nuit
c’est d’abord un bruit
mais pas n’importe quel bruit
Un bruissement régulier
en l’absence de vent
Un ressassement continu
Le flux et le reflux au rythme des vagues
La lune est son amie
sans elle la mer serait immobile
On ne la voit pas
au milieu des ombres
Pourtant elle est là
on sent sa présence
Proche ou lointaine
immense et infinie
