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C'est flou ce qu'on s'est aimé

 

roman à quatre mains

 

J’ai rencontré Martine grâce à sa peinture, mais ce sont surtout ses poèmes qui m’ont séduit.

 

J’ai apprécié sa fantaisie, sa sensibilité, son goût de liberté et aussi sa rigueur qui l’ont amenée à joliment maîtriser cette discipline difficile.

 

Je lui ai ouvert mes cahiers secrets qu’elle a aimés, qu’elle a corrigés avec une douce fermeté et, de cette coopération est née notre complicité.

 

Nous avons eu l’envie de croiser nos fils pour tisser ensemble cette œuvre commune qui nous a apporté beaucoup de joies mais aussi bien des surprises.

 

Chose extraordinaire, l’apprenti sorcier que j’étais n’était plus maître de son histoire et je voyais devant mes yeux ébahis les personnages vivre leur vie en se moquant bien de mon avis.

 

La fiction devenait la vraie vie.

 

 

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Sans Jack et les nouvelles sucrées-salées qu’il m’a dévoilées, je ne serais peut-être jamais passée de l’écriture soumise à des règles strictes qu’est la poésie classique à une autre forme d’expression plus libre et plus spontanée qui m’a aussitôt séduite.

 

De quelques lignes écrites au hasard puis jetées comme un défi, est née une collaboration de plusieurs mois qui a abouti à ce roman à quatre mains.

 

Le personnage de Mina qui prenait vie et consistance au fur et à mesure que j’avançais dans le récit, m’a habitée de la première ligne au point final. Jour après jour, c’est elle qui dirigeait ma plume.

 

Etrange expérience que celle-ci, d’autant plus fascinante que l’on n’est pas toujours le maître du jeu.

 

Ce qui est certain, c’est que désormais, l’écriture fait partie intégrante de ma vie.

 

Chapitre 1 (Martine)

 

« Anatole, le petit lapin, s’endormit très vite, épuisé par toutes les émotions qu’il venait de vivre. Il se souviendrait à jamais de son merveilleux voyage. Â»

Mina referma le livre. Encore sous le charme de sa voix légèrement enrouée et agréablement modulée, son auditoire restait immobile, le regard vague, comme paralysé. Puis l’un des enfants s’ébroua doucement pour s’arracher à son rêve et vint déposer sur la joue de la jeune fille un gros baiser. Lentement, le petit groupe rejoignit l’animatrice et quitta calmement la bibliothèque. Elle appréciait particulièrement le mercredi et elle avait institué depuis quelques mois déjà « l’heure du conte Â» pour les plus jeunes du centre de loisirs. Les enfants raffolaient également de ce rendez-vous hebdomadaire. Dès qu’ils avaient choisi un livre, ils venaient s’asseoir sagement tout près de la chaise de Mina, certains même, parfois, osaient effleurer ses chaussures ou toucher ses vêtements. Pour faire durer le plaisir de l’attente, elle faisait semblant de chercher son ouvrage, d’hésiter entre plusieurs contes, puis attaquait l’histoire, créant l’émotion, suscitant l’effroi ou le rire parmi les enfants. Tel le joueur de flûte de Hamelin, elle emmenait sa petite troupe en un voyage féérique aux confins de l’imagination. 

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Elle caressa pensivement la couverture de l'album, avant de le ranger. Que de progrès, ces dernières années dans la littérature enfantine ! Beaucoup d’illustrations lui semblaient extraordinaires ! Chaque page était une véritable Å“uvre d’art. On était bien loin des petits livres d’or de son enfance ! Pourtant ceux-ci lui avaient procuré énormément de plaisir. Elle en avait toute une collection. Souvent, au réveil de la sieste, sa mère ou sa grand-mère lui faisaient la surprise d’un nouvel album. Sa passion pour la lecture découlait sûrement de là. Elle adorait son métier, déplorant le manque de respect de certains. Pour limiter les pages cornées, elle s’amusait, pendant ses permanences, quand il n’y avait pas beaucoup de clients à illustrer aux crayons de couleur, les signets où elle inscrivait la date de retour du livre afin que les lecteurs les utilisent comme marque-page.

Il était temps de partir. Elle choisit quelques romans policiers pour son usage personnel et quitta la bibliothèque.

Pour l’état civil, elle s’appelait Nathalie Doriac, Mina, pour sa famille et les intimes, Nath pour ses collègues et les enfants.

Son appartement, se situant dans le centre-ville à quelques centaines de mètres de son lieu de travail, elle s'y rendait à pied. Une fois chez elle, elle se changea rapidement, libérant sa crinière blonde, troquant ses lunettes à monture d’écaille pour des lentilles de contact, son strict tailleur-pantalon pour une mini-jupe et un tee-shirt moulant. Un soupçon de maquillage acheva de métamorphoser la sage bibliothécaire en une flamboyante jeune femme sur qui les passants se retourneraient immanquablement. Le soleil brillait et pénétrait à flots par la grande baie vitrée. Mina regretta de ne pouvoir ni se faire bronzer nue sur son balcon, à l’abri des regards, ni rejoindre la petite plage naturiste, dans les dunes, où, parmi d’autres adeptes à la peau boucanée, elle aimait offrir son corps à la douce morsure du soleil. Il n’y avait pas de temps à perdre ! Elle ressortit pour prendre sa voiture : une coccinelle rouge décapotable, couverte de fleurs autocollantes. Le moteur pétaradait un peu, mais en ces années soixante-dix, on attachait plus d’importance à l’aspect extérieur de son véhicule qu’au bon état de la mécanique. Elle ôta ses sandales à semelles compensées, replia la capote et alluma l’autoradio. Par chance, un morceau de Led Zeppelin passait sur les ondes. C’est au son des accords de guitare de Stairway to Heaven qu’elle démarra sa Volkswagen fleurie. Comme toutes les fois qu’elle écoutait cette chanson, les paroles l'amenaient à s’interroger. Quelle drôle d’idée, que cet escalier pour le paradis, alors qu’il était si simple de trouver le bonheur dans chaque instant que la vie offrait. Et puis qu’entendait-on par ces mots ? S’agissait-il de drogue comme en consommaient les membres des groupes qu'elle affectionnait : Pink Floyd, Les Doors, Procol Harum… Dommage que de si belles mélodies aient été écrites sous l’emprise de ces substances ! Ne pouvait-il pas y avoir de création libre et affranchie de ces auxiliaires douteux ?

Par cette belle journée de juillet, la circulation était fluide et Mina quitta rapidement le centre-ville. Roulant un peu trop vite, pieds nus, selon son habitude, elle s’engagea dans un quartier de la rive droite. Le vent dans l’habitacle faisait tournoyer ses longs cheveux et soulevait sa jupe légère sur ses jambes bronzées. Après avoir tourné dans des rues étroites et peu fréquentées, elle s’arrêta devant une petite maison, une construction typique de l’après-guerre : deux pièces en bas, deux pièces à l’étage. Avant de descendre de son « bolide Â», Mina remit ses chaussures. Elle ressentit une étrange impression totalement inexpliquée, une sorte de difficulté à respirer et le duvet de ses bras se dressa légèrement. Le portillon rouillé grinça, comme toujours, mais ce bruit familier ne fit qu’accroître son malaise. La jeune fille sonna plusieurs fois. Elle entendait carillonner à l’intérieur, mais à part cela, le silence ! Pas de pas familier pour l’accueillir. Alors elle chercha dans son sac les clefs de la maison et ouvrit la porte. Toujours oppressée, elle pénétra prudemment dans le couloir sans lumière.

Hélas, c’est déjà fini !

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