
Automne 2025

Quelques citations et textes d'auteurs

Automne
Vois ce fruit, chaque jour plus tiède et plus vermeil,
Se gonfler doucement aux regards du soleil !
Sa sève, à chaque instant plus riche et plus féconde,
L’emplit, on le dirait, de volupté profonde.
Sous les feux d’un soleil invisible et puissant,
Notre cœur est semblable à ce fruit mûrissant.
De sucs plus abondants chaque jour il enivre,
Et, maintenant mûri, il est heureux de vivre.
L’automne vient : le fruit se vide et va tomber,
Mais sa gaine est vivante et demande à germer.
L’âge arrive, le cœur se referme en silence,
Mais, pour l’été promis, il garde sa semence.
Ondine Valmore

Arrière-saison
La couleur verte
tremble
entre les mains
de l’automne
La mort maquille
les feuilles
pour leurs noces
avec le givre
Un silence très ancien
se loge
dans la lumière
qui se tait
et le Temps jette
les heures insouciantes
dans un feu sans mémoire
Kamal Zerdoumi

Chanson d’automne
Les sanglots longs
Des violons
De l’automne
Blessent mon cœur
D’une langueur
Monotone.
Tout suffocant
Et blême, quand
Sonne l’heure,
Je me souviens
Des jours anciens
Et je pleure
Et je m’en vais
Au vent mauvais
Qui m’emporte
Deçà, delà,
Pareil à la
Feuille morte.
Paul Verlaine, Poèmes saturniens

Automne
Dans le brouillard s’en vont un paysan cagneux
Et son bœuf lentement dans le brouillard d’automne
Qui cache les hameaux pauvres et vergogneux
Et s’en allant là-bas le paysan chantonne
Une chanson d’amour et d’infidélité
Qui parle d’une bague et d’un cœur que l’on brise
Oh! l’automne l’automne a fait mourir l’été
Dans le brouillard s’en vont deux silhouettes grises
Guillaume Apollinaire, Alcools, 1913

Automne
Matins frileux
Le temps se vêt de brume ;
Le vent retrousse au cou des pigeons bleus
Les plumes.
La poule appelle
Le pépiant fretin de ses poussins
Sous l’aile.
Panache au clair et glaive nu
Les lansquenets des girouettes
Pirouettent.
L’air est rugueux et cru ;
Un chat près du foyer se pelotonne ;
Et tout à coup, du coin du bois résonne,
Monotone et discord,
L’appel tintamarrant des cors
D’automne.
Emile Verhaeren, 1895

Les poèmes du Cercle (thème libre)

Si j’osais
Je tirerais à moi tout le bleu du ciel pour m’en faire un drap de lit
Si j’osais
Je déroberais l’écume des vagues avant qu’elle disparaisse dans le sable et m’en ferais un jupon de dentelle
Si j’osais
La nuit je détacherais de l’horizon le fil de lumière des bateaux en attente et ce serait mon unique collier
Si j’osais
J’arrêterais ce goéland en plein vol, je m’accrocherais à ses ailes et à l’abri de son plumage gris je le prierais de m’emporter et de céder encore et encore aux belles fantaisies du vent
Si j’osais
Je prendrais entre mes bras ouverts tous les feuillages naissants des arbres, je les étreindrais, je les froisserais, le visage enfoui dans la splendeur de leur floraison printanière
Si j’osais
Je me coucherais dans le coton rose des nuages et je me laisserais dériver à la frontière du soleil et de la lune, à la tombée du jour.
Si j’osais
J’appellerais l’aube à la rescousse et puis le crépuscule et puis la nuit noire. Assis ensemble sur le rivage nous accorderions notre souffle à la lente et régulière respiration de l’océan.

Comme un parfum de poésie
Nostalgique ou léger, à l'instar d'un parfum
Tout comme celui-ci exhale ses fragrances
Qu'il soit slam, acrostiche ou sonnet des plus fins
Un poème déploie mille et une nuances.
Dès le premier instant, c'est la note de tête
Éphémère et ténue comme un amour d'été
Qui s'offre à tous nos sens. De l'œuvre du poète
On apprécie d'abord la musicalité.
Vient la note de cœur, un peu moins volatile
Qui donne à l'élixir sa personnalité.
Le poète peaufine et imprime son style
Qui fera de ses vers l'originalité.
Le parfum restera gravé dans la mémoire
Grâce à l'intensité de la note de fond.
Un poème émouvant qui raconte une histoire
Perdure lorsqu'il est porteur d'un sens profond.

Peinture : Martine Desgrippes Devaux

Nuit propice
Lorsque la nuit arrive et repose mon âme,
Des rêves incertains traversent mon esprit
Qui déjà délivré songe à douces femmes
Pleines de majesté dans leurs plaisants habits.
Je pense à mon passé dénué d’ironie
Où gisent mes amours à jamais abolis
Et dans mon sommeil calme où ronfle un doux mystère,
Je retrouve la paix qui fut mienne naguère.
Un nuage parcourt mon corps tout endormi
Où le silence aimé ignore l’inertie.
Je l’aime tendrement sans le croire éternel,
Espérant de son âme arrêter l’âpre fiel.
Mais quand le jour paraît annonçant le réveil,
Je souris dans mon lit, plein de doux alibis,
Tandis qu’un souffle ami refusant l’acédie
D'une joie infinie attend le tendre éveil.


Désir indiscret
Quel désir indiscret m’offrira son remède
À l’heure du réveil où se pâme ma vie ?
Un beau jour serait-il un heureux intermède
À la fin du sommeil où cesse l’atonie ?
La conscience engourdie ignore mon baiser
Et un songe endormi s’en va plein d’inertie
Alors qu’un sombre ciel plein d’étoiles dorées
Étonne mon esprit rêvant de liberté.
Un sourire ignoré inonde mon visage.
Saurais-je lui répondre avec humilité ?
Je m’apprête à lui rendre un somptueux hommage
Par un désir ailé rempli d’aménité.
Par quel hasard secret guetterai-je ma vie
Qui va sans maugréer vers sa félicité ?
Je marche sans pleurer vers d’ardentes lubies,
Ignorant de l’amour la suprême ironie.
Guérison
A quoi bon ignorer nos plus belles mémoires ?
Un soleil affamé console nos blessures.
Nous irons apaisés vers d'autres territoires.
Plus rien ne creusera nos tendres meurtrissures.
Une aurore blessée allumera le soir.
On rêve d'achever une ultime prière.
Une flamme oubliée délivrera l'espoir.
A l'ombre du baiser glissera l'ombre fière.
Plus rien n'arrêtera nos humbles souvenirs.
Nous viendrons sans tarder ressusciter l'amour.
Un mystère sacré cueillera l'avenir
et le songe éveillé accueillera le jour.



Il n’est jamais trop tard
Il n’est jamais trop tard
pour modifier sa façon
de voir !
On se forge des idées
on pense qu’elles sont
la voix de la raison
j’entends d’autres sons
des si et des si
et si je me trompais
et si ma voie menait
trop loin, nulle part
sans trouver ma raison
nulle part, au hasard
comment savoir ?
J’ai marché, marché
sans rien trouver
sans aucun son
les oreilles fermées
comment savoir
la raison
pour voir ou croire
Il n’est jamais trop tard
pour ne plus vouloir
marcher dans le noir
menant nulle part
ailleurs de sa maison
oubliant ses chaussons
et les « si et les si «
créant des soucis
au lieu d’oublier
Il n’est jamais trop tard
pour vouloir
la paix de ses idées
fausses ou vraies
ne sachant pas la raison
des « pourquoi » du hasard !
Danydeb (2025)

LES FEUILLES MORTES
Les feuilles mortes
geignent sous mes pas
tombées à terre
comme des pierres
j’exagère ?
Les pauvres, pas fières …
fanées, ternes et rabougries
c’est la fin de l’été
d’une année monotone
au calendrier, l’automne
après une saison terminée
les feuilles d’automne
dorment monotones
et ma tête abandonne
que mon cœur raisonne
gai comme un pinson ?
à la lecture d’une chanson
et de ta voix au téléphone
qui me donne le ton
répété à l’unisson
comme un disque rayé
d’une histoire terminée
parce que c’était hier
heureux sur cette terre
désertée par l’hiver
qui pointe son nez
les feuilles mortes
sont belles à regarder
témoins de nos jeunes années
elles nous ont accompagnées
mon Amour, mon frère
ma sœur pense à la douceur
d’avoir vécu ensemble
au pays qui ressemble
à la couleur du bonheur
les feuilles mortes
après mes jeunes années
rougissent à mes pieds


Chant des Poètes
Les poètes dansent avec les mots.
Ils font sourire les vilains nuages.
Avec un rire et des milliers d’échos,
Ils mettent de la couleur sur les pages !
Vive les poètes, chantez avec nous !
Vive les poètes, chantons à leurs voix,
Leurs vers nous portent, de l’aube jusqu’au bout !
La poésie met tous les cœurs en joie !
Ils transforment les ombres en lumière,
Du gris, du noir, tout devient arc-en-ciel.
Chaque rime est une nouvelle terre,
Chaque image, un vrai trésor sans pareil !
Clap, clap, tape des pieds, frappe des mains,
Répète leurs mots encore et encore !
Chante, crie et danse jusqu’au matin,
Vois la joie des poètes heureux éclore !

Gaza Gaza
Savez-vous qu’en ce moment
les oiseaux ne se cachent pas
pour mourir
simplement ils quittent la ville
vont vers le soleil
Vole oiseau
va vers le soleil
quitte la ville
car il ne fait pas bon
d’être au-dessus de Gaza
le ciel est noir le ciel est en feu
la nuit ne viendra pas
la nuit est déjà là
Va oiseau
quitte la ville
va vers le soleil
le ciel est asséché
comme le cœur des hommes
Mais que font les tambours de la pluie ?
Du ciel on ne voit plus guère la ville
où les immeubles effondrés
gisent sur le flanc
comme de vieux bateaux
abandonnés après naufrage
et toutes ces colonnes de fumée
qui continuent de noyer le ciel
Gaza Gaza chantent
éperdument les oiseaux
ils vont vers le soleil
sans voir ces milliers de soldats
qui lèvent la tête
et sentent cette odeur de brûlé
cette odeur douceâtre
qui hante la ville désormais
Les soldats ont oublié
oublié vous dis-je
pourtant cette odeur cette odeur
ne leur rappelle-t-elle pas
celle des crématoires
celle qui montait autrefois
sous un autre ciel
Les oiseaux savent
car ils ont de la mémoire
Va oiseau
va vers le soleil
quitte la ville
Il n’y aura pas de lune cette nuit


Touchez pas à ma lune
Touchez pas à ma lune vous les anciens
les modernes qui avaient terni sa réputation
à force de répéter comme des ânes
« t’es con comme la lune »
« t’es lunatique »
« t’es vraiment mal luné mon gars »
« tu veux la voir ma lune »
ou autres expressions fleuries du même genre
mais qu’est-ce qui vous a pris
C’est peut-être sa couleur jaune couleur maléfique
qui vous a inspiré ce mauvais esprit
Imbéciles vous qui continuez à regarder le doigt
au lieu de regarder la lune
suivez-moi je vais à la rencontre
de la lune vous montrer ce qu’elle est vraiment
tâchez d’entrer dans la nuit les yeux ouverts
Astre de la nuit pour les poètes
point ultime du i levé dans le ciel
au milieu des étoiles du firmament
vous la voyez-là qui éclaire la nuit dans toute sa beauté
mon astre au visage de femme si tranquille si inoffensive
Ronde comme un sein
elle déverse ses rayons de lait
sur la terre endormie
Vous pouvez la regarder en face
ses rayons ne vous brûleront pas
Elle berce la mer comme un enfant
une fois vers la grève une autre vers le large
puis elle recommence indéfiniment
Et vous savez quoi
parfois on croit que la brume de la nuit cache la lune
non ce sont ses larmes qui tombent sur le malheur du monde
Elle disparaît à l’arrivée du jour
pour revenir furtivement fantôme de la nuit
Touchez pas à ma lune
