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Histoire(s)

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Quelques citations

L'homme n'est pas entièrement coupable : il n'a pas commencé l'histoire ; ni tout à fait innocent, puisqu'il la continue. Albert Camus

J'aime bien les histoires qui finissent mal. Ce sont les plus belles car ce sont celles qui ressemblent le plus à la vie. Pierre Desproges

L'histoire est une galerie de tableaux où il y a peu d'originaux et beaucoup de copies.

Alexis de Tocqueville

Comment nos descendants éloignés s'y prendront-ils pour porter le fardeau de l'histoire que nous allons leur laisser après quelques siècles ? Emmanuel Kant

Le roman est l'histoire du présent,

tandis que l'histoire est le roman du passé. Georges Duhamel

Le nez de Cléopâtre : s'il eut été plus court, toute la face de la terre aurait changé.

Blaise Pascal

Les histoires sont le meilleur moyen d'élever la vie au-dessus de la médiocrité du quotidien. Gilles Legardinier

La peinture est de plus en plus proche de la poésie, maintenant que la photographie l'a libérée du besoin de raconter une histoire.

Georges Braque

Quand le passé n'éclaire plus l'avenir, l'esprit marche dans les ténèbres.

Alexis de Tocqueville

Pour que l'événement le plus banal devienne une aventure, il faut et il suffit qu'on se mette à le raconter. Jean-Paul Sartre

Nos poèmes

Retour de marché

 

Monsieur Dumollet

revient du marché,

le chapeau baissé,

le pas chahuté,

le nez cabossé

rouge violacé

et fessier serré

Qu’est-il arrivé ?

Il a bien mangé,

bien bu, bien roté,

mais a oublié

 juste de payer

et c’est l’hôtelier

furieux et frustré

qui l’a expulsé

d’un poing sur le nez

et d’un coup de pied

Juste bien placé….

Monsieur Dumollet,

Rentré du marché

chapeau relevé,

sourire discret.

il a bien mangé,

bien bu, bien roté,

Un peu de retrait

pour se réparer

et il sera prêt

à recommencer.

 

Irène Gaultier-Leblond   11 janvier 2024

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Le loup, les renards et l’enfant charbonnier.

 

Aussi fort que l’on soit, on n’est pas à l’abri

d’être dupe d’un plus petit

pourvu que l’amitié s’unisse avec l’esprit.

 

Un jour, l’enfant des bois qui s’appelait Javier

vit s’approcher de lui un loup de grande taille,

 le cou portant encore des plumets de volaille,

 et qui examinait alentour, étonné :

 

C’est donc là la maison du petit charbonnier

dit-il fixant la hutte de son regard de braise ?

C’est exact dit l’enfant et j’y suis à mon aise

Aurais-tu quelque ennui ce soir à te loger ?

 

Mais le loup poursuivit : et tu vis seul ici ?

n’as-tu pas peur ? Javier le coupa sans manière

—toi-même m’a-t-on dit n’es-tu pas solitaire ?

Dit le garçon tout en scrutant autour de lui.

 

Rassuré de n’y voir aucun autre comparse

  il affirme, faraud, qu’aurai-je à craindre ici,

je ne compte avec toi   compris, que des amis ;  

s’efforçant de tourner son propos à la farce.

 

J’ai besoin justement de quelqu’un pour m’aider

à charger le foyer dont la grille si haute

Me vaut une fêlure actuelle d’une côte.,

 un service entre amis ne se peut refuser ? 

 

Bien sûr répond le loup dont la faim s’exaspère

Cependant qu’un renard aux aguets a compris ;

Il convoque ses pairs pour faire bloc avec lui

quand l’imposteur sera en posture précaire

 

et quand le loup debout recharge le foyer,  

les renards le basculent, queue par-dessus la tête

et pattes fouettant l’air amer de la défaite

tandis que le garçon rabat grille et loquet.

 

L’odeur de loup rôti aussitôt se répand

titillant les naseaux de la gent animale

qui afflue de partout   pour une bacchanale

dont la forêt entière se souviendra longtemps….

 

 

Irène Gaultier-Leblond   3 février 2024

                                Itinéraire                                                                 

 

 

Qui cherche à dessiner notre humble itinéraire ?

Je sais que notre amour est comme un long voyage.

Une femme étonnée inspire le mystère.

Un ange endimanché délivre son message.

 

On songe à nous guider vers d'autres territoires.

Nous sentons-nous grisés par l'ultime aventure ?

Une flamme inspirée apporte sa victoire.

Le goût de nos baisers éloigne nos blessures.

 

Laisserons-nous charmer par l'ultime élixir ?

Un visage éclairé arbore son espoir.

La larme d'un instant oublie son repentir

et le rire embrasé illumine le soir.

 

Marc Rébéna      

Les conteurs

 

 

J'ai toujours aimé l'Histoire,

la vraie, celle des moments

qui nous laissent apercevoir

le vécu d'autres vivants...

 

J'ai aussi appris à aimer

les fables, "ces jolis mensonges

pour mieux dire la vérité"

qu'elles dégageront des songes.

                       oOo

Pour moi, l'Histoire ne s'écrit pas,

elle se conte au coin du feu.

On croit la connaître déjà,

on la découvre peu à peu...

 

Les conteurs sont des magiciens.

Ils nous emmènent en d'autres mondes,

comprendre notre quotidien,

pour une vie plus féconde...

 

Julie - avril 2024

Les beaux parleurs

 

 

"Le conteur est un magicien.

Il nous emmène en d'autres mondes

comprendre notre quotidien

pour une vie plus féconde".

 

C'est ce que j'avais compris

des fabliaux de mon enfance,

des contes que l'on m'a transmis

tout au long de mon existence.

 

Puis la vie m'a fait rencontrer

ceux qu'on appelle "beaux parleurs".

Ils peuvent nous envelopper

dans une toile de rumeurs.

 

Aujourd'hui, c'est un vrai poison

qui affecte nos sociétés.

On ne sait plus qui a raison,

s'il existe une Vérité ?

 

De grâce, ne confondons

les "beaux parleurs" et les "conteurs".

Les uns vivent de désunions,

les autres sont des créateurs.                                      

 

            Julie - avril 2024

Le Souper à Emmaüs (Le Caravage)

EMMAÜS

 

 

Ils étaient deux hommes fuyant Jérusalem

le cœur bien lourd et l’âme empreinte de tristesse.

Leur Maître et grand ami (visait-il le grand chelem ?)

a été mis à mort et grande est leur détresse.

 

Ils vont vers Emmaüs cacher leur désarroi,

loin du lieu du supplice, en cet humble village.

Ils revivent le drame : mais pourquoi cette croix ?

Question lancinante. Ont-ils tous été lâches ?

 

Un homme les rejoint, discret. Un inconnu.

« De quoi donc parliez-vous ? dit-il et il rappelle

nombre d’écritures : ce qui est advenu

était bien annoncé et c’est une grande nouvelle. »

                                                                                    Les voici à l’auberge. Ils vont se séparer,                         

mais nos deux compagnons conquis, émus lui disent :

« Reste ! Il fait presque nuit. Entrons nous restaurer. »

Ainsi fut-il admis. En un geste de mise,

à table, l’inconnu prend la miche de pain,

dit quelques mots d’offrande et … la partage.

C’EST LA RÉVÉLATION ! Ils la connaissent bien

cette fraction du pain. Nul besoin d’autre message.

 

Nos deux amis, saisis, voudraient bien s’exprimer…

IL N’Y A PLUS PERSONNE ! Mais eux soudain comprennent.

Nous étions si troublés, disent-ils, lorsqu’Il parlait.

IL EST VIVANT ! et plein d’espoir ils se reprennent.

 

Dans un nouvel élan ils rebroussent chemin,

pressés de rejoindre pour d’heureux lendemains

et dire à leurs frères et à tous leurs amis :

« IL EST RESSUSCITÉ COMME IL L’AVAIT PROMIS. »

 

Et le cœur allégé, c’est en toute hâte

qu’ils accourent enfin pour célébrer la PÂQUE.

 

Jeanne FOUCHER      Avril 2024

I

 

une histoire sans histoire

qui compte sur le secret

pour puiser son énigme

là où elle s'abreuve

donnée à l'origine

mais d'une source tarie

pleure déjà la naïade

 

illisible et mutique

c'est une histoire sans geste

qu'un pont soudain

qui esquisse la rivière

qu'elle franchit

avant d'abandonner

son excellence au cygne

III

 

un point entre rien et rien

de grands hommes à effets

des biographies infertiles

le choix d'un monde

ou sa duplication

traînant dans les livres

plus sournois que la vie

 

un point assumé- la vie

ne donnant aucune loi

c'est le sang qui signe

les déroutes et les crimes

du passif qui déroule

des valeurs de pierre

- d'entêtés vestiges

II

 

l'événement ultime

sans passé ni futur

- un choix de combattant-

ruisselle sur l'instant

(cette histoire éternelle)

qui se déplie et se replie

dans le cœur d'une horloge

 

en déchet de miroir

il disputera

son silence aux mystères

aux chercheurs de causes

et de non- lieux fertiles

où la cible se pâme

d'une flèche oblique

IV

 

un accident universel

sans cause que la manière

qui s'est faite esprit

s'incarnant dans les pierres

à l'abandon de la conscience

(diplomaties & traités

ne veillant qu'à eux- mêmes)

 

après l'espace le regard

des terriens vers la lune

et manquant de soleil

l'esprit boiteux

jusqu'à la poussière résolue

-un chant étrange-

désertera les mémoires

 

 

Ludovic Duclos

Histoire d'histoire(s)

 

Il était une fois une histoire

mais n'est-il jamais qu'une fois

nous nous sommes raconté tant d'histoires

 

Il était une fois une histoire

nous nous en racontons encore tellement

ne serait-ce que nos souvenirs et nos apprentissages

il y a tant de biais dans nos rapports avec nous-mêmes

 

Il était une fois une histoire

tant de contes à dormir debout à raconter debout

« Contes et mécomptes » quand la Grande Histoire

avec son H triplement majuscule

vient à trancher la vanité de notre existence en nos menus racontars

 

Il était une fois        il était une fois       coupez

hé, pas si vite l'histoire n'est pas finie

il y a encore une fois

 

Il était donc une fois une histoire

 

mais à quoi bon

chacun se raconte sa petite histoire

sans écouter vraiment celles des autres

sinon pour ajouter un détail pittoresque à son propre récit

 

À la fin il sera une fois une histoire

 

Daniel-Claude Collin /avril 2024

Ciné cure

Histoires à déguster

 

Le médecin sérieux, proclame son verdict :

« Votre taux de tristesse est bien trop élevé,

Il faudra vous soumettre à un régime strict,

Suivre mes instructions pour le faire baisser ! »

 

Gare à la grande bouffe, prenez vos précautions :

« Faites une ciné cure ! »  Dit l’homme qui m’ausculte

« Voici en quelques mots mes recommandations :

Composez, je vous prie, quelques agapes cultes ! »

Beignets de tomates vertes, servis pour commencer,

Ou bien la soupe au chou, surtout quand on grelotte ;

Et chacun vous dira :  C’est bien ce qu’il « Fallet » * !

Placez dans le bouillon, de craquantes biscottes !

 

À la carte, les mets et la cuisine au beurre,

Festin salé-sucré vous donnent rendez-vous.

Laissez le riz amer, qui trop souvent, écœure…

Les saveurs du palais n’existent que pour vous…

 

Avec macaroni, un délice aigre-doux :

Le poulet au vinaigre, alors, nous séduira :

Mangeons l’aile ou la cuisse, un instant, soyons fous :

La sauce chabrolienne le divinisera !

 

La ratatouille, à table, exalte la jouissance,

Et les bœufs-carottes, en diverses manières,

Chaque fois, un peu plus, fascineront vos sens,

Cuisinés en cocotte ou dans un plat en terre !

 

Le Duo sur canapé, le canard à l’orange

Quand on fait bonne chère, le trou normand s’impose,

Pour digérer, sans faille, les viandes que l’on mange,

L’expert en Calvados, comme un magicien, dose *…

 

Le déjeuner sur l’herbe dévoile un buffet froid,

Cerise, bananas et la noix de coco,

Les fruits de la passion ou les quatre à la fois,

Un flan aux pommes, poires, ananas, abricots…

 

Jambon-jambon toujours, nature ou bien fumé…

Les œufs brouillés, les truffes, dignement, se marient…

Pour un noble dessert exquis et parfumé,

Aimez la religieuse ou le parfait cookie !

 

À la fin d’un repas, quand Gérard chante « Oury »,

La glace vanille-fraise est un luxe de roi.

Le chocolat fondant poétise la vie !

Opterez-vous un jour, pour le festin chinois ?

 

Prisez le caviar rouge, lorsque viendra Noël, 

Vous, la princesse aux huîtres, exigez les meilleures !

N’oubliez pas la bûche, aux fruits, au caramel

Et sablez le champagne, honorable faveur !

 

Salivant d’impatience, jusqu’à l’apothéose,

L’appétit se réveille quand le chef entre en scène !

Sur la grande cuisine, règne l’art du virtuose :

Le dîner, le souper…Oh ! Delicatessen !

 

Celui qui par la science, guérit nos maladies,

Disciple d’Hippocrate, aux conseils judicieux,

M’a dit : Le goût des autres varie à l’infini ;

La maison du bonheur brille, sous tous les cieux ! »

 

                                     Monique Renault

Dans le texte, les mots en caractères gras et en italique font référence au Septième Art.

*René Fallet : Auteur de La soupe aux choux adapté au Cinéma par Jean Girault   -

*Le Magicien d’Oz : Roman de L. Frank Baum, adapté au cinéma par Victor Fleming.

Auschwitz 1980

 

                                                           Fils barbelés  

 

Brouillard  

 

Corbeaux                                               

 

Miradors                                                  

 

Blocs en brique                                             

Porte de l’enfer

                                                         

Le travail rend libre

                                                           Rails rouillés au milieu d’herbes folles

                                                            Valises

                                                           Cheveux emmêlés derrière des vitrines

                                                          Silence

                                                           Touristes braillards

                                                           Mise en scène bleutée

                                                           Obscène et édifiante

                                                           D’un déporté polonais

                                                           Auschwitz aujourd’hui

 

                                                           Bernard Denouel

Françoise

 

Elle s’appelait Françoise

 

Elle était secrétaire dactylo en 1940

au Palais de Justice de Rouen

 

Elle tapait à la machine à écrire les arrêtés d’exécution des condamnés à mort

 

Elle ne se posait pas de questions

 

Elle n’exprimait aucun remords

 

Elle était simplement gênée

 

Elle décida un jour de changer d’Administration

 

Elle devint secrétaire dactylo à la préfecture

 

Elle ne tapait plus les arrêtés d’exécution

 

Elle retrouva sa tranquillité d’esprit

 

Tout était rentré dans l’ordre

 

Bernard Denouel

Guerre d’Algérie

 

un jour d’été

dans une petite ville tranquille

en bord de Seine

 

un café ordinaire

au fond d’une rue

non loin du centre-ville

 

la lumière jouait tout au long

du vieux comptoir de zinc

 

peu de monde à cette heure dans ce café

 

deux hommes assis à une table l’un en civil

c’était mon père l’autre en uniforme

évoquaient le souvenir de leurs morts

c’était la fin de la guerre d’Algérie

 

je me souviens des grandes photos en noir et blanc

des deux gendarmes tués accrochées

à un mur blanc de la caserne l’un s’appelait Padrine

l’autre ce soldat sans nom

je l’ai oublié

 

Ils buvaient lentement leur café chaud

 

dehors le soleil brillait

un homme attendait patiemment

l’arme au poing

 

l’homme en uniforme sortit le premier

il parcourut quelques mètres

dans la rue déserte

 

un coup de feu claqua un seul

il tomba sans un cri tête la première

 

sur le trottoir éclaboussé de soleil

le sang semblait s’écouler à l’infini

 

Bernard Denouel

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Mme Roche née Bois d’Enghien

 

 

Mme Bois d’Enghien était fière de son nom

 

Elle vivait tranquille dans un petit village

de l’Eure

 

Elle avait dû être belle

 

Ses cheveux bleu cendré éclairaient

son fin visage

 

Un jour de juin quarante quatre

deux hommes vinrent la chercher

pour la mener à la mairie

 

Son crime avoir hébergé des Allemands

 

Elle ne comprenait pas ce qui lui arrivait

 

Elle aussi avait un regard perdu d’enfant

 

Ils ne lui ont pas craché dessus

ils ne l’ont pas tondue

 

Ils lui ont simplement fait peur

au-delà de leur espérance

 

Vingt-cinq ans après elle demandait

elle exigeait toujours réparation

 

Elle est morte seule sur un lit d’hôpital

après un lavage d’estomac

 

Elle avait quatre-vingt-douze ans

 

 

Bernard Denouel

La dernière chaumière

 

Un rêve ? Non il y eut bien un jour une chaumière juchée sur le haut d’une colline à l’orée de Kergrist. On aurait dit un bateau échoué sur une grève dont la mer se serait retirée en laissant les rochers à nu la dernière chaumière du village chantée par le poète. Difficile de le croire aujourd’hui avec ces murs en ruine ces restes de pierres. Ö cette chaumière portait son toit de chaume comme le poids d’une douleur ! Et la douleur elle affleurait parfois comme les pierres cette souffrance de maman enfant de trois ans à la mort de sa propre mère sa quête éperdue dans le cimetière en criant son nom la mort d’enfants la chute de sa belle-mère dans le lavoir sa paralysie et enfin ces cinq années interminables de la guerre avec son cortège de faim de cruauté ses rumeurs de pendus ses arrestations la fouille des Allemands à la recherche des réfractaires du STO l’oncle Paul caché sous un lit la peur la peur la peur et ce bombardier américain en feu ces corolles blanches des parachutes se déployant dans le ciel … Pourtant il y eut aussi de la vie dans cette chaumière des rires des pleurs d’enfants la joie de ma mère quand elle reçut sa première orange à Noël elle la conserva longtemps cette orange… Elle protégeait cette chaumière de ses murs de granit épais comme des bras de géant ses deux fenêtres laissant passer un jour blafard des hivers froids des hivers de neige en ce temps-là sa cheminée ne pouvant chauffer toute la grande pièce… Comme dans un rêve de coton deux institutrices descendant en ski les champs enneigés sous les yeux émerveillés de maman enfant. Mais la vie était rude alors mon grand-père cantonnier partait à l’aube sur son vélo toutes les activités humaines se faisaient à la main pour l’eau il fallait descendre à la fontaine puis remonter les seaux pleins sur le raidillon empierré les femmes elles se rencontraient les jours du lavoir lieu où les nouvelles du village circulaient les femmes parlaient aussi des hommes pas toujours en bien. Ce monde a disparu il était celui du Cheval d’Orgueil.

Bernard Denouel

Varsovie août 1982

 

Varsovie par une douce soirée d’été quatre amis dans la rue qui s’en vont au hasard

Un soleil crépusculaire fait briller les maisons patriciennes

Ils marchent au milieu d’un décor de théâtre ou de cinéma

Les immeubles reconstruits à l’identique après-guerre ont en effet un faux air de carton-pâte

Il n’y a pas de voitures

La foule remonte vers la grande place du roi Sigismond 1er les quatre amis suivent

Tout Varsovie semble descendu dans la rue

Au loin comme la rumeur de la mer lorsque celle-ci est à marée haute

Peu à peu on entend des cris des hurlements des vociférations

Le ciel semble se noyer au-dessus de la ville

Sur la place un cordon de policiers barre l’avenue les chiens grondent et aboient

C’est le jour où les militants de Solidarnosc se rendent une fois par mois se recueillir après du monument de la victoire

Les miliciens embarquent de temps en temps brutalement un type qui les insulte

Puis le cordon s’ouvre la foule remonte lentement l’avenue les quatre compères la suivent toujours

Soudain à nouveau des cris des cris de panique cette fois la foule reflue en courant vers la place

Les quatre amis suivent le mouvement courent et montent précipitamment dans les bus qui ouvrent leurs portes

Plus tard c’est la rencontre avec un jeune Polonais

Il les accueille dans son appartement

Il y vit seul avec sa mère

Une ancienne résistante de l’armée nationale défaite par les nazis après que l’armée rouge ait refusé d’intervenir en traversant la Vistule

Cette dame aux cheveux blancs exprime sa haine à l’égard des Russes elle se dit prête à reprendre le fusil contre leurs chars

Avec précaution elle va vérifier sur le palier si aucun espion n’est à l’écoute

Mais elle dit aussi autre chose une chose étrange

Cela va mal en France en ce moment précisément parce que les Juifs sont au pouvoir Fabius n’est-il pas Premier ministre

Les quatre amis se taisent

 

Bernard Denouel

L’heure du conte

 

 

 

Si tu veux, mon enfant, toi et moi, nous irons

Dans ce pays lointain où vivent des princesses,

Des sorciers malfaisants, de vaillants bûcherons,

Des elfes, des lutins et des enchanteresses.

 

 

Si tu veux, tu seras fille d’un puissant roi,

Ravissante endormie ou fière aventurière.

Tu connaîtras l’amour, parfois même l’effroi,

Mais tout s’achèvera de bien jolie manière.

 

 

Si tu veux t’évader et si tu veux frémir,

Le voyage envoûtant que tu aimes tant vivre,

Nous le ferons ensemble avant de t’endormir.

Mais si tu ne veux pas, je referme le livre.

 

 

Martine Desgrippes Devaux

Humeurs entomologiques

fable

Il y a bien longtemps, le peuple des insectes

Connut des convulsions et des passions suspectes.

 

La jeunesse d’abord entra en rébellion,

S’insurgeant violemment contre l’éducation.

 

La colère enflammait larves et chrysalides

Qui voulaient abolir des lois liberticides.

 

Et ce fut dans la rue un fameux branle-bas,

Où la foule scandait : « Continuons le combat ! »

 

Le roi, un grand criquet qui avait fait la guerre,

Était un gouvernant assez autoritaire.

 

Il envoya bientôt de sombres bataillons

Qui devaient sans pitié mater l’insurrection.

 

La gent industrieuse, abeilles et termites,

Rejoignit les mutins en rangs hétéroclites.

 

Et pendant ce temps-là, cigales et grillons

Célébraient l’amour libre et la révolution.

 

Libellules, fourmis, mouches et coccinelles

Réclamaient à hauts cris de nouveaux droits pour elles.

 

Lassé par le chaos, le vieux roi s’éclipsa,

Alors, en quelques jours, la pagaille cessa.

 

Chacun rentra chez soi et redevint docile

Avec le souvenir d’un tumulte inutile.

 

Pas tout à fait, pourtant, car les mentalités

Surent évoluer vers plus de libertés.              

 

Martine Desgrippes Devaux

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