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L'éphémère
Thème national du printemps des poètes

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Quelques citations et textes d'auteurs

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Nous ne sommes que les maillons éphémères d'une chaîne que traîne à ses pieds un fantôme nommé Temps qui court à l'infini droit sur le néant.

Les anges meurent de nos blessures -          Yasmina Khadra

Un chef-d'œuvre peut être oublié par le temps, on peut l'interdire ou l'ensevelir, mais toujours ce qui est durable triomphe inévitablement de ce qui est éphémère.

Les très riches heures de l'humanité -

         Stefan Zweig

Mais elle était du monde, où les plus belles choses

Ont le pire destin ;

Et rose elle a vécu ce que vivent les roses,

L'espace d'un matin.  

Consolation à M. Du Périer -

         François de Malherbe

Comment peut-on se prendre au sérieux quand l'existence est si éphémère et qu'elle ne cesse de courir vers sa fin ?

Le message - Andrée Chedid

Le bonheur ne chausse que les bottes du provisoire. Qui nous a certifié le contraire ? Dans une vie humaine, toujours est toujours éphémère.

L'élixir d'amour de Éric-Emmanuel Schmitt

Adieu à l’enfance   

 

Adieu mes jours enfants, paradis éphémère !

Fleur que brûle déjà le regard du soleil,

Source dormeuse où rit une douce chimère,

Adieu ! L’aurore fuit. C’est l’instant du réveil !

 

J’ai cherché vainement à retenir tes ailes

Sur mon cœur qui battait, disant : « Voici le jour ! »

J’ai cherché vainement parmi mes jeux fidèles

A prolonger mon sort dans ton calme séjour ;

 

L’heure est sonnée, adieu mon printemps, fleur sauvage ;

Demain tant de bonheur sera le souvenir.

Adieu ! Voici l’été ; je redoute l’orage ;

Midi porte l’éclair, et midi va venir.

Ondine Valmore

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Les couples éphémères

 

 

Regardez-les passer, ces couples éphémères !

Dans les bras l'un de l'autre enlacés un moment,

Tous, avant de mêler à jamais leurs poussières,

Font le même serment :

 

Toujours ! Un mot hardi que les cieux qui vieillissent

Avec étonnement entendent prononcer,

Et qu'osent répéter des lèvres qui pâlissent

Et qui vont se glacer.

 

Vous qui vivez si peu, pourquoi cette promesse

Qu'un élan d'espérance arrache à votre cœur,

Vain défi qu'au néant vous jetez, dans l'ivresse

D'un instant de bonheur ?

 

 

Amants, autour de vous une voix inflexible

Crie à tout ce qui naît : « Aime et meurs ici-bas ! »

La mort est implacable et le ciel insensible ;

Vous n'échapperez pas.

 

 

Eh bien ! puisqu'il le faut, sans trouble et sans murmure,

Forts de ce même amour dont vous vous enivrez

Et perdus dans le sein de l'immense Nature,

Aimez donc, et mourez !

Louise Ackerman

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Chant d'automne

Bientôt nous plongerons dans les froides ténèbres ;
Adieu, vive clarté de nos étés trop courts !
J’entends déjà tomber avec des chocs funèbres
Le bois retentissant sur le pavé des cours.

Tout l’hiver va rentrer dans mon être : colère,
Haine, frissons, horreur, labeur dur et forcé,
Et, comme le soleil dans son enfer polaire,
Mon coeur ne sera plus qu’un bloc rouge et glacé.

J’écoute en frémissant chaque bûche qui tombe ;
L’échafaud qu’on bâtit n’a pas d’écho plus sourd.
Mon esprit est pareil à la tour qui succombe
Sous les coups du bélier infatigable et lourd.

Il me semble, bercé par ce choc monotone,
Qu’on cloue en grande hâte un cercueil quelque part.
Pour qui ? – C’était hier l’été ; voici l’automne !
Ce bruit mystérieux sonne comme un départ.

Charles Baudelaire Les Fleurs du mal

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Mignonne, allons voir si la rose

A Cassandre

 

Mignonne, allons voir si la rose

Qui ce matin avoit desclose

Sa robe de pourpre au Soleil,

A point perdu ceste vesprée

Les plis de sa robe pourprée,

Et son teint au vostre pareil.

 

Las ! voyez comme en peu d'espace,

Mignonne, elle a dessus la place

Las ! las ses beautez laissé cheoir !

Ô vrayment marastre Nature,

Puis qu'une telle fleur ne dure

Que du matin jusques au soir !

 

Donc, si vous me croyez, mignonne,

Tandis que vostre âge fleuronne

En sa plus verte nouveauté,

Cueillez, cueillez vostre jeunesse :

Comme à ceste fleur la vieillesse

Fera ternir vostre beauté.

Pierre de Ronsard

Saisir l’instant 

 

Saisir l’instant tel une fleur
Qu’on insère entre deux feuillets
Et rien n’existe avant après
Dans la suite infinie des heures.


Saisir l’instant.

Saisir l’instant. S’y réfugier.
Et s’en repaître. En rêver.
À cette épave s’accrocher.
Le mettre à l’éternel présent.


Saisir l’instant.

Saisir l’instant. Construire un monde.
Se répéter que lui seul compte
Et que le reste est complément.
S’en nourrir inlassablement.

Saisir l’instant.

Saisir l’instant tel un bouquet
Et de sa fraîcheur s’imprégner.
Et de ses couleurs se gaver.
Ah ! combien riche alors j’étais !


Saisir l’instant.

Saisir l’instant à peine né
Et le bercer comme un enfant.
A quel moment ai-je cessé ?
Pourquoi ne puis-je… ?

Esther Granek

Nos poèmes

Création ?

Qui peut pousser l’homme ou l’enfant

à construire sur le néant ?

L’enfant sait que la vague aura

raison de son château de sable

et pourtant il poursuit immuable

et lorsque l’eau arrive au ras

de son édifice, il trépigne

battant des mains devant la ruine,

que se passe-t-il dans son cœur ?

De même en est-il du sculpteur

Ciselant la glace en sachant

L’inanité de son talent,

Quand il suffira au soleil

De signer son arrêt mortel !     

 Le rêve est-il donc plus puissant

Qu’une négation passagère ?

La création sur l’éphémère ?

 La beauté contre le néant ?

Irène Gaultier-Leblond

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Le lion d’Arcachon.

 

 

Le lion qui dressait, sans rugir, sur la plage,

sa tête au grand soleil du ciel bleu d’Arcachon,

la crinière figée en un collier sauvage,

n’était en vérité qu’une contrefaçon.

 

Un sculpteur avait fait, plus tôt, de sable humide,

cette œuvre ressemblant au roi des animaux

venu se prélasser, de manière insolite,

au bord de l’océan où passaient des bateaux.

 

Combien de temps tiendra la statue éphémère

exigeant de l’artiste autant de vrai talent ?

Quand les flots monteront, la mer saura défaire

tout ce qui fut construit, d’un revers nonchalant !

 

Michel BARTHA     May-sur-Orne, le 30 janvier 2022.

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L’ART DE L’ÉPHÉMÈRE

 

Il s’active ardemment devant son bloc énorme

qu’il lui faut travailler selon son choix rêvé.

Qu’en sera-t-il alors ? Le roc prendra-t-il forme,

entaillé, buriné, car il faut innover ?

 

En sculpteur inspiré caressant en secret

le beau sujet conçu et auquel il aspire,

avec passion il creuse la matière sans regret.

Tenace, il la façonne, il la crée, la respire.

 

Moderne Praxitèle* à la tâche voué

l’artiste généreux, tendu se renouvelle :

Objet ? Ou visage connu, corps enlacés ?

Le mystère retenu peu à peu se révèle.

 

L’œuvre est faite, croit-on pour la postérité.

Son auteur désireux l’aime et lui donne vie.

On le loue, on l’admire avec grande équité

et parfois peut-être s’y mêle un peu d’envie.

 

L’ouvrage, au soleil, brille. Ainsi passent les jours.

Mais voici que survient - déroutante surprise –

la fonte de l’ensemble abrogeant les contours.

Toute l’œuvre s’estompe. Où donc est la méprise ?

 

C’est de l’art éphémère et des choses fugaces

requérant de l’auteur un grand détachement :

Il y mit tout son cœur sachant pertinemment

sa vraie destination : le bloc était de glace.

 

* Praxitèle : sculpteur de l’antiquité grecque

 

Jeanne FOUCHER   Mars 2022

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une course contre la mort

dans l'exercice d'une existence

un phalène dans le silence

aux électriques ailes denses

qui poursuit ses origines

 

une larme qui hésite

au bord de la paupière

qu'un rayon initie

à la vie exilée

 

la page qui se souvient

déjà tournée au pire

d'une leçon sans fondation

qu'un souffle qui se hâte

d'être ce qu'il ne peut qu'être

- et diviser l'air qu'il respire

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Les vents de hasard

Rencontres éphémères

 

                    

Marchant sur le pont Neuf, musardant au hasard,

Ami, si tu rencontres l’indésirable Bise, 

Prends garde à ton chapeau, il peut, sans crier gare,

Voler comme un oiseau, quand l’espiègle le vise.

 

Ma Belle, si tu croises un vent nommé Zéphir,

Surveille le malin, car il se pourrait fort,

Qu’un beau jour, par surprise, sur le pont des Soupirs,

Ta charmante jupette tourne et vire de bord !

 

Un matin de printemps, devant le pont du Gard,

Je reconnus, soudain, le mistral impétueux,

Alors qu’il capturait, sans honte et sans égard,

Le joli ruban rouge, qui nouait mes cheveux !

 

Mais le pont Mirabeau m’offrit une autre scène :

Telle Mary Poppins, la dame s’envola,

Emportée par le vent, elle plongea dans la Seine,

Au bout du parapluie, et l’enfant rigola… 

 Monique Renault

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pour revenir du soleil

et qualifier ce visage

avant qu'il ne défie

le miroir qui s'entend

aux choses passagères

 

rêver plus qu'il ne faut

(baiser à l'avenir)

ne retenir ces rêves

que du bout de l'esquisse

 

des détails (de bris)

avant l'éternelle satiété

d'une image inconnue

pour peser ce discours

Ludovic Duclos

PHOTOGRAPHIE

 

 

Saisir le temps en un instant

Cette illusion, cet irréel

Quand sur l’instant instantané

Apparaît le reflet passé.

 

C’est un éphémère éternel

Imprimé sur papier glacé

Là, où les traits se sont figés

Pour un moment d’éternité.

 

Il suffirait de savoir lire

Pour remonter dans le passé,

Savoir cerner et discerner

Tout ce que cache un sourire.

 

Car si le passé transparaît

A la commissure des lèvres

En filigrane du portrait

L’impression saisie est trop brève.

 

Et pour garder l’instant rebelle,

L’instant vieilli à peine né,

Où ma mère fragile et belle

M’accompagnait sur ce cliché

Déjà la vie nous séparait.

                                                                          Danièle MANOURY   CAEN LE 29 OCTOBRE 2021

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Jeunesse illusoire

Du matin jusqu’au soir

Aveuglée de leur miroir

 

Leurs pères et mères

Ont eu la même histoire

 

Vivez donc votre espoir

A votre cœur si cher

 

Et laissez « Nous » choir

Ingratitude éphémère

Avant le dernier soir

 

Danydeb

J’aime

Les éternités passagères

Les instants suspendus

Les secondes parfaites

Les poignées d’hirondelles

Jetées contre le bleu du ciel

 

J’aime

La fragilité de l’écume

Sur les sables trop noirs

Et la respiration de la mer

Comme une ancienne voix

Que l’on m’aurait offerte en héritage

 

J’aime

Les cicatrices sur les pierres

Et le froissement des arbres

Quand ils embrasent les nuages

 

J’aime le creux tiède des mains

Sur la dentelle du crépuscule

 

J’aime

Les mots en attente

Les respirations suspendues au mitan de la phrase

La beauté simple des gestes

Quand ils se croisent

Quand ils s’accordent

Compagnons d’un exil à la couleur de miel

 

J’aime la pluie

Sur le papier de mes rêves

Et le doigt sur la bouche

Pour le doux silence d’un ange.

 

Véronique Garrigou

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Rencontre

      éphémère ...

 

- poème en prose -

 

Mon bus descend vers la ville

tranquillement.

Comme un vieux cheval de trait,

il connaît son chemin...

 

La ville est calme à cette heure !

 

Par la vitre empoussiérée

J'aperçois soudain une femme à vélo...

Rapidement, elle passe.

 

Et je me prends à rêver !

 

D'où vient-elle ? Que fait-elle ?

Quelles sont ses joies, ses peines ?

A-t-elle une famille ?

Que pense-t-elle de la Vie ?

 

Mais au fait,

je n'ai pas vu son visage !...

Je ne saurais jamais la reconnaître !

 

Tristement je réalise :

qu'elles sont bien faibles les chances

de nous croiser à nouveau !

 

Rencontre éphémère !...

 

Et combien …

à chaque instant,

dans le monde entier ?

 

                                                              Julie - mars 2022

Une chanson éphémère

 

Vole la ritournelle

 D’un avion sans ailes,

Murmure une mélodie

À mon cœur aussi.

S’enlace et se prélasse,

Se lasse et s’efface,

Cette douce chanson

Taquine et sans nom

Fredonnée sans cesse,

Petite diablesse,

S’enfuit, s’oublie puis revient

Pour disparaître enfin

Dans les plis secrets

D’un esprit inquiet

Qui traque ce drôle d’air

Et chasse l’éphémère. 

 

Brigitte Vivien

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L’île éphémère

 

Au début de juillet mil huit cent trente et un

Il advint qu’Empédocle, un volcan sous-marin

Entra en éruption dans la mer de Sicile

Et la lave en fusion fit apparaître une île.

 

Ce rougeâtre récif dont accoucha la mer

Semblait par sa couleur émerger de l’enfer.

Mais l’îlot minuscule et pourtant stratégique

Perturba quelque temps le jeu diplomatique.

 

La Sicile d’abord y planta son drapeau

Mais des pays voisins, jaloux de ce dépôt,

Tels le Royaume Uni, l’Espagne ou bien la France

De l’île convoitée exigeaient la jouissance.

 

Et chacun, tour à tour, planta son étendard,

Ôtant le précédent sans respect ni égard.

Mais quelques mois plus tard, érodée par les lames,

L’île n’exista plus, ce qui mit fin aux drames.

 

On lui donna le nom de Ferdinandea

Pour honorer le roi, puis Graham, ou Julia.

Jules Verne et Dumas en contèrent l’histoire,

Et l’île disparue resta dans les mémoires.

Martine Desgrippes Devaux

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UN SOURIRE BRILLANT

 

Un bambin tout sourire

Œil et canine brillant

Dans l'azur du plaisir

D'un amour revigorant

 

Être père c'est agir

Aimer en le protégeant

De bien-être un soupir

Fit-il en s'endormant

 

Tenter de l’écrire

Et profiter de l’instant

Le meilleur est à venir

Sur le fil du roman

 

Kevin ZAGNI

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le miroir à l'envers nie le reflet

la nuit enfle l'orgueil

- ce fil qui retient le réel

et la vie qui gonfle d'existence

et de sève patiente dès l'aurore

aux desseins lunatiques s'évitant

un destin trop rapide- esquisse

qui s'évade de la mémoire

 

ô psyché définitive

la nuit n'est pas encor en fuite

que la lune veille sur le rythme

de ces paupières battant la mesure

d'une vision ahurie et secrète

qui fait frissonner le hasard

- un portrait gris sur le mur

fait reculer la distance

Sourire

L’éphémère est le sourire

Qui se pose sur la fleur

Léger comme le bonheur,

Délicat comme un pistil,

Généreux, tendre et subtil

L’éphémère est le sourire

Qui mène jusqu’à ton cœur

Irène Gaultier Leblond

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derrière la brume- le regard

les gouttes dispersent le silence

déjà les yeux apparaissant

suffisent à la gaieté

c'est le drame de l'hiver

qui butine le temps

comme une abeille approximative

- retours et distances

 

après la pluie l'absence

puis du regard qui résiste

une larme s'évapore

jusqu'à l'horizon intime

 

la course d'un piéton qui tremble

comme une ombre en équilibre

entre l'instant et sa faillite

dans le doute d'un fruit

sur une note furtive

traçant sa ligne

Ludovic Duclos

UN CERTAIN JEAN- BAPTISTE

 De la scène éphémère à l’immortalité

 

 

 

Il sut mieux que personne, éclairer notre esprit,

Jean- Baptiste Poquelin,  étonnant saltimbanque !

Depuis  quatre cents ans, sa verve et son génie

Résonnent encore si fort que toujours, il nous manque.

 

Il naquit à Paris ; Pézenas l’honora,

Peintre de l’âme humaine et Prince des tréteaux !

Théâtres voyageurs,  l’empreinte de vos pas,

Dans l’espace et le temps, épouse celle des mots…

 

Séduisant notre oreille, pour nous ouvrir les yeux,

Il écrivait la vie et chacun découvrait

Sur la scène éphémère, des portraits audacieux,

Comme un miroir tendu, criant de vérité !

 

Conjuguant le courage et l’opiniâtreté,

Au milieu de sa troupe à nulle autre pareille,

Il décryptait le monde, d’un regard avisé,

Triomphant à Versailles, auprès du roi Soleil…

 

Précieuses ridicules, Médecin malgré lui,

Un Bourgeois gentilhomme, un Tartuffe, un Avare,

Quelques Femmes savantes, L’école des maris,

Fâcheux et Misanthrope qui s’affichent sans fard…

 

Adages pertinents de sa libre pensée,

Malade imaginaire, Fourberies de Scapin,

Les amants magnifiques, révélant leurs secrets…

La liste serait longue et le talent divin !

 

Lorsque, Monsieur Molière, vous traversez les âges,

Votre œuvre n’a d’égale que la modernité…

Dignement, aujourd’hui, saurons-nous être sages,

Pour qu’au Panthéon brille votre immortalité?                     

 

A Molière (Jean-Baptiste Poquelin : 15 Janvier 1622- 17 Février 1673)

Monique Renault

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L’éphéméride.

 

 

Que ça te gène ou tu le veuilles,

le calendrier sur le mur,

l’une après l’autre, perd ses feuilles

s’acheminant vers un futur.

 

Le temps, selon l’éphéméride,

s’égraine inexorablement,

page après page, pleine ou vide,

emportée où le veut le vent.

 

Chargés de cent projets naguère,

papiers juste bons pour le feu,

ils jonchent, indolents, la terre,

tels des confettis sans aveu.

 

Qu’as-tu fait de ton existence

qui veillait seule à ton chevet ?

Le vin qui reste a le goût rance

dans ton calice inachevé !

 

Michel BARTHA :

May-sur-Orne, le 29 janvier 2022.

L'éphéméride ?

 

           ou le temps qui passe...

 

 

Déjà ! se dit l'ancien ado

Arrivant à soixante-dix ans,

Je n'ai pas vu passer le temps

Où sont partis mes idéaux ?

 

Les années se sont écoulées

Gardant le nez sur le guidon.

Je crains d'avoir tourné en rond

Laissant des trésors de côté...

 

Pourrais-je encor' me rattraper ?

Et vivre enfin réellement,

En profitant de mon présent,

De tout ce qui m'est destiné ?

 

                 oOo

 

Le passé reste le passé

On ne peut le récupérer.

Alors croquons à belles dents

La vie de nos quatre-vingts ans !..

 

             ---------

                                                               Julie - mars 2022

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PUTAIN

 

 

Depuis tôt ce matin

Sur le dos d’un mâtin

L’éphémère volait

Et parfois se posait.

        Putain !

 

 

Après un coup de frein

Et un bon coup de rein

Le mâtin s’arrêta

Et le catapulta.

      Putain !

 

 

Dans la soupe à l’oignon

L’éphémère mignon

Rencontra son destin

Pour lui, ce fut la fin.

       Putain !

 

 

                                                              

Danièle MANOURY      CAEN LE 19 JUIN 2021

À L’ÉPHÉMÈRE

 

Bestiole insignifiante

légère, transparente

emportée par le vent,

bousculée par l’autan,

si fine, si petite

que l’on te discrédite,

quel est donc ton statut

ton destin in situ ?

Amoureux des eaux douces

là où les herbes poussent,

tu t’actives pour quoi ?

Conçois-tu quelque choix ?

 

Sais-tu que ta vie brève

en un seul jour s’achève ?

Et que pour toi le temps

ne sera que latent.

 

Énigme d’une vie

qui ne peut faire envie

vu sa brièveté

son inutilité.

 

Mais qui sait ? Tu existes

peut-être simpliste

mais pour quelle raison ?

Que nous dit ta chanson ?

Qui à toi s’intéresse

pour que tu apparaisses,

aliment pour oiseau

ou quelque vermisseau,

créature minime

à la présence infime.

 

Respectons le mystère

de qui est éphémère.

Jeanne FOUCHER     Mars 2022

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L’éphémère

 

 

conscience d'un instant

 

d'un éphémère bonheur

 

qui ne peut être parfait

 

tout est éphémère

 

quitte à se tromper

 

de croire à tout jamais

 

aussitôt goûtées

 

heures éphémères

 

d’un autre temps  

 

tout au long des ans

 

s’égrène le bonheur

 

d'un vécu éphémère

 

conscience d’un instant

 

d'un monde imparfait

 

aussi changeant

 

 qu’éphémère

 

toutes ces heures on les prend

 

comme des signes de bonheur

 

quand bien même, éphémères.

 

Danydeb 

Je t’arabesque

Je t’encoquille

Je te compose

te recompose

en lettres cursives sur une plage blanche

du bout des doigts

un tracé doux comme la soie

Je t’ellipse

Je te danse

Je te gribouille pour te faire rire

Et puis j’efface

Je recommence

Je te vertige

et je t’envole sur l’aube bleue

Je te murmure

Je te jasmine

Je t’asphodèle

Je t’ensable

et puis je signe

d’un trait de plume à l’encre noire

étrange logogramme

qui nous résume

qui nous contient

puis qui s’efface…

 

 

Véronique Garrigou

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Éphémère

(acrostiche)

 

Et la surprise est au jardin

Poudré de neige ce matin !

Haies et rosiers, au bout des branches,

Exhibent leurs mitaines blanches ;

Même le thuya compassé

Est tout fier d’être damassé.

Reste la mésange blottie

Espérant seule une éclaircie. 

 

Irène Gaultier Leblond

PARADISIAQUES  CONFIDENCES …

 

 

 

Un flacon de parfum séduit par une rose,

S’en approche, soudain, lui dit de tendres choses…

La fleur fait une pause, puis, elle dit son nom :

« Je m’appelle la Rose et je viens du Japon...

Comme j’aimerais vivre, en votre écrin de verre,

Et savoir que j’enivre, ainsi, la terre entière !

Si mon corps est gracile, le temps est assassin,

Ma fragrance subtile s’évanouira demain.

Est-il un Paradis, pour que toujours j’existe?

Ephémère je suis, voilà ce qui m’attriste. »

 

Alors, s’approchant d’elle, avec délicatesse,

Le galant lui révèle une digne promesse:

« Venez sous d’autres cieux, à Grasse au mois de mai,

Un Eden merveilleux qui saura vous charmer.

Jasmin et Camélias, de prestigieuses fleurs,

Noble Centifolia apaiseront vos peurs. »

 

«Oui mais, d’où viennent-elles ? » dit l’aimable ingénue.

« Cette flore est si belle que je me sens perdue ! » 

 

La Rose de velours éblouit le flacon

Dont quelques mots d’amour échappent à sa raison :

« Des quatre coins du monde, ou ici, par milliers,

Et leurs arômes inondent  la Méditerranée …

Que vous veniez d’Espagne, de France ou bien de Chine,

Les nez vous accompagnent, vous hument et vous butinent…

Honorant l’un des sens, ils chérissent toujours

Sans quête d’indécence, vos insignes atours.

Je vous convie au bal de la sensualité ;

En  mon corps de cristal, vous pourrez enlacer

Les essences fleuries, les notes épicées

Et leur valse jolie viendra vous exalter !

Alors, votre parfum vivra à tout  jamais,

Pour nous offrir,  enfin, la grâce et la beauté. »

 

Monique Renault

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Cueillez dès aujourd’hui…

 

« Cueillez dès aujourd’hui les roses de la vie. »

Tel fut le bon conseil du poète averti.

Vous qui l’avez suivi êtes épanouie

malgré la mort qui veille et la peur de l’oubli.

 

Vous étiez jeune et belle et pleine de confiance.

L’amour vous a saisie au plus beau de vos jours.

Avec votre bon zèle, vous sûtes sans défiance

devenir son amie, lui qui vous fit la cour.

 

Vous fûtes bonne amante en tout point admirable.

Votre tendre baiser enchanta votre amant.

Et votre voix charmante au grain inégalable

sut toujours l’envoûter infatigablement.

 

L’âge est venu sans bruit comme un léger souci.

Vous resterez ce soir avec vos souvenirs.

Plus rien ne vous ennuie aux confins de la vie.

Comme aurait dit Ronsard, aimer c’est rajeunir !

 

Marc REBENA L’essence des jours 2011

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Haïkus

La rose éphémère

Pleure l’amour déposé   

Au creux de son cœur.

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Tes jours sont comptés        

Libellule de l‘été,

Il est temps d’aimer

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 L’hirondelle

 

 

A la coupe d’un lys l’hirondelle vient boire,

Se posant doucement sur le frêle perchoir,

Elle incline la tête, savourant la rosée,

Que les fées du matin sont venues déposer.

Le col est incliné sous le poids du fardeau

Et offre avec candeur son ciboire à l’oiseau,

Les pattes délicates ne blessent pas la fleur

Comme le noir manteau accentue sa Blancheur.

En ce moment béni, savourons le délice,

De ce charmant tableau, qui doucement s’éclipse,

Dans le matin naissant, un doux bruissement d’ailes,

A peine perceptible, à fait fuir l’hirondelle.

 

Françoise ANDRE

L’éphémère c’est

L’image dans le miroir

Où ne reste rien.

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Où sont-ils donc nos bancs d'école

 

Où sont-ils donc nos bancs d'école

Et nos tabliers à carreaux,

Quand nous apprenions l'espagnol

En ne rajoutant que des O

C'était le temps des farandoles

Des courses folles dans les champs,

On se battait pour nos idoles,

Mais ce n'était jamais méchant.

Et on s'échangeait nos secrets

Arsenics et vieilles dentelles

Mais on restait toujours discrets,

Si l’on était à la chapelle.

Nos boucles d'oreille en cerise

Amusaient beaucoup les garçons

On se prenait pour des marquises

Confectionnant de longs jupons,

Avec du papier d'emballage,

Et on mettait sur nos corsages

La bruyère et le liseron.

Où sont-ils donc nos bancs d'école

Et nos tabliers à carreaux

Les blés mûrs et les herbes folles

Qui nous menaient jusqu'au ruisseau.

Il paraît si loin ce temps-là,

Le temps, où on lisait Zola.

 

Françoise ANDRE                   

et pour finir, un texte en prose :

Je voudrais être cet instant, ce moment où le passé devient le présent devenant ensuite le futur. Un pas vers le passé et j’oublie le futur et le présent ; un pas vers le futur et la mémoire est ravivée. Cet instant éphémère à jamais continuel, cette fusion de molécules mémorielles, ce cerveau du Temps qui me projette dans le futur en faisant en sorte que le passé ne s’oublie pas.

Oui, être cet espace-temps universel où la première mémoire, ce cerveau, cet instinct, commun à tout les êtres vivants qu’ils soient volants, rampants, nageants, qu’ils soient mobiles ou immobiles, matériels ou immatériels. Cet être invisible est tellement visible, telle une substance de tout et de rien.

Non, pas une machine, pas une mémoire d’ordinateur.

Juste le moment de la conception, de la création, ce big-bang fusionnel, ce feu d’artifice.

 

-       Clic-clac ! Faisait le criquet que tenait dans ses doigts le soldat américain.

-       Clic-clac ! fut la réponse du fusil que le soldat allemand armait.

 

Ce « clic-clac » perdu au fin fond des bois a trouvé une réponse. Le soldat américain, en se dirigeant vers son camarade qui lui avait donné le signe de reconnaissance, a compris sa méprise en voyant l’uniforme ennemi devant lui.

 

Pas le temps de reprendre sa respiration, pas le temps de faire luire la peur dans le regard qu’une balle entra dans son front, le trouant de part et d’autre, sans une éclaboussure. Une mort nette, rapide qui n’a laissé aucune chance à la vie mais que la mort attendait avec patience.

 

As-tu eu le temps, cher soldat qui donna ta vie à une juste cause, de voir la mort en face ? T’a-t-elle laissé le temps du souvenir ?

 

Car moi, je voudrais me souvenir de ce Temps tellement rapide que le Temps des Hommes ne peut le calculer, cet instant où les trois temps se mêlent pour ne laisser la place qu’au futur. Car à ce moment-là, à l’instant du basculement, le passé et le présent n’existent plus. Le no mans land temporel.

 

Mais non, je ne veux pas être une balle donnant la mort ni me faire mourir pour connaitre ce moment ni être la faucheuse. Non ! Qui sait si cette idée n’est pas une future déception.

 

© Krystin Vesterälen – 2 novembre 2014

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